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Fantin-Latour : A fleur de peau

Des portraits, des fleurs, des œuvres d’imagination. De la réalité à la rêverie. L’accrochage chronologique des quelque 120 œuvres de Fantin-Latour (1836-1904) illustre bien l’évolution du peintre, portraitiste d’abord, puis portraitiste de fleurs, pour finir peintre de “sujets d’imagination” où il abandonne toute austérité pour des toiles légères de personnages féminins vaporeux.

Renvoyé des Beaux-Arts à 18 ans faute de progrès, Fantin-Latour est d’abord refusé au Salon mais est accepté au Salon des Refusés quatre ans plus tard. Il a déjà exposé à la Royal Academy de Londres l’année précédente. Grand solitaire, pas vraiment novateur, Fantin-Latour refuse de se rattacher à un mouvement ou école. Il s’affranchit du réalisme à la Courbet, et prendra ses distances avec la peinture sur le motif. Créateur , à ses débuts, de portraits familiaux, tout de noir vêtus, ou d’autoportraits qui ne s’arrachaient pas, le peintre, qui répétait à l’envi son désir de peindre des chefs d’œuvre, finit néanmoins par laisser sa marque dans l’histoire de la peinture du 19e siècle grâce, surtout, à ses natures mortes et ses portraits de groupe d’artistes en hommage, entre autres, à Delacroix et Manet (Hommage à Delacroix, 1864 et Un atelier aux Batignolles, 1870).

L’exposition s’ouvre sur des autoportraits (dont l’un peint à 17 ans trahit déjà la psychologie de l’artiste) et des portraits de sa famille, à laquelle Fantin Latour échappera en partant pour Londres en 1859. Ses amis anglais le pousseront vers les natures mortes, un sujet qui lui tiendra à cœur, tout en lui assurant de bons revenus. L’exposition compte une vingtaine de bouquets, peints dans les années 70 et 80. Des bouquets exquis, de ceux que l’on pourrait composer chez soi tellement l’assemblage des fleurs parait simple (à l’inverse des bouquets hollandais sophistiqués qui mélangeaient parfois les fleurs de diverses saisons). “Un carré de silence”, disait Claudel de Roses, 1889, qui trahit, comme les autres natures mortes du peintre, un environnement familier, aisé et harmonieux.

À la même période, il revient aux portraits de ses proches (“on peint les gens comme des pots de fleurs”), mais décline les commandes contraignantes. C’est après un séjour à Bayreuth qu’il assume pleinement son désir de peinture d’imagination nourrie par la musique wagnérienne et peuplée de corps féminins aériens. À partir de 1890, il abandonnera portraits et natures mortes. “Je suis arrivé lentement de la réalité au rêve. Ce voyage a presque duré ma vie”, dira-t-il. Après sa mort en 1904, Fantin devait tomber dans l’oubli jusqu’aux années 70 où les historiens de l’art s’intéressèrent de nouveau aux peintres restés en marge des mouvements d’avant-garde.

Des sévères portraits de ses sœurs à Ariane abandonnée, 1899, dénudée, ondoyante, colorée sur fond de ciel/mer lumineux, un beau voyage pour le regardeur !

Elisabeth Hopkins

 Catalogue, 256 pages, 240 illustrations. Éditions de la RMN, 2016 - 35€

Visuels : Henri Fantin-Latour, Autoportrait, la tête légèrement baissée, 1861. Huile sur toile, 25,1 x 21,4 cm Washington, National Gallery of Art, Courtesy National Gallery of Art, Washington.
Henri Fantin-Latour, Fleurs d’été et fruits, 1866. Huile sur toile ; 73 x 59,7 cm, États-Unis, The Toledo Museum of Art © The Toledo Museum of Art.
Henri Fantin-Latour, La Nuit, 1897, huile sur toile ; 61 x 75 cm Paris, musée d’Orsay © Rmn-Grand Palais (musée d’Orsay) / Photo Hervé Lewandowski.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 14 septembre 2016 au 12 février 2017
Musée du Luxembourg
19, rue de Vaugirard - 75006 Paris
Ouvert tous les jours de 10h30 à 19h
Nocturne le vendredi jusqu’à 22h
Entrée : 12€
www.museeduluxembourg.fr