Radioscopie de la France des années 2020 par 200 regards de photographes

Missionnés par la Bibliothèque nationale de France, 200 photographes de la presse nationale et internationale livrent en 500 clichés leur regard sur la France au sortir de la pandémie de COVID-19. Des artistes de 21 à 81 ans, (dont 40% de femmes), de tous les territoires français, aussi divers dans leurs sujets, dans leurs écritures photographiques, que dans leurs formats de monstration.

Après « La France de Raymond Depardon » en 2010 et « Paysages français, une aventure photographique (1984-2017) » en 2017, cette commande d’ampleur historique (au total 2000 tirages produits et un budget de 5,46 millions d’euros) permet de redessiner les contours de la France. Ses territoires, les préoccupations sociales, économiques, écologiques et culturelles, mais aussi l’urbanisme, la ruralité, les loisirs, les revendications individuelles et identitaires, les réfugiés, l’immigration...

On pouvait craindre un saupoudrage de photographies ne permettant ni de mettre en lumière la spécificité de chaque photographe, ni surtout de rendre compte des permanences et mutations de la société française. Il n’en est rien. Chaque auteur est représenté par deux à quatre photographies, une biographie et un résumé de l’objectif de la thématique choisie. Quelque soit leur sujet, certains ont fait le choix de capter l’instant ou l’événement. D’autres ont opté pour un registre plus intemporel, voire métaphorique. L’ensemble, plein de vitalité, est une passionnante Radioscopie de la France des années 2020.

Libertés, égalités, fraternités…potentialités

Organisé autour de la devise nationale conjuguée au pluriel - « Libertés », « Égalités », « Fraternités » - et augmentée d’un horizon de « Potentialités » en prise avec les nouveaux défis environnementaux et technologiques, le parcours met en évidence une France plurielle. « À la fois ouverte sur le monde et tentée par le repli, connectée et fragmentée, égalitaire et inégale, marquée par une nouvelle hiérarchie des territoires, une plus grande individualisation du travail, une économie et des paysages nouveaux, et des rapports au monde de plus en plus divergents », soulignent les deux commissaires : Héloïse Conésa et Emmanuelle Hascoët.

« Libertés », réunit une cinquantaine de photographes. On retrouve chez certains l’impact de la pandémie, la perte de liberté et l’isolement induit, qu’il s’agisse de familles séparées, (Hans Zeeldieb), d’étudiants isolés dans leur chambre (Lucille Saillant) ou de personnes âgées privées de sortie quotidienne (Anaïs Boileau). Pour de nombreux autres, la notion de liberté c’est aussi celle de l’expression, du culte, du corps, de la sexualité, de l’identité…Un vaste registre.

La deuxième partie, « Égalités », interroge grâce au travail de 68 photographes les conditions de travail et ses mutations, ses disparités, ses difficultés, sa perte aussi par fermeture d’usines (Gilles Favier), désertification rurale (Ambroise Tézenas). Sont pointés aussi les inégalités, les rapports hommes-femmes, les marginalités.

La troisième partie, « Fraternités », fait dialoguer les sujets de 39 photographes autour de l’altérité et du vivre-ensemble, du repas de famille (Laurent Moynat) à l’accueil des réfugiés (Laurent Van der Stockt) en passant par l’aide alimentaire (Lys Arango).

Enfin, « Potentialités » met en avant les travaux de 43 photographes qui ont fait le choix de s’interroger sur ce que peuvent être aujourd’hui les marqueurs d’un « monde d’après ». Les solutions pour contrer les conséquences du réchauffement climatique sur le littoral (Bertrand Stofleth). Les réponses aux nuisances sonores, comme celles liées à la proximité des aéroports (Cyrus Cornut). L’autonomie alimentaire et l’expérience des jardins collectifs (Véronique Popinet). L’isolement induit par la pratique intensive des jeux vidéo (Odile Gine). Les défis et espoirs liés à la nouvelle ère spatiale qui s’ouvre (Giulo Di Sturco).

Ces clichés exposés et l’ensemble de ceux produits dans le cadre de la commande vont rejoindre les collections de photographies de la BnF, l’une des plus riches au monde. Une mémoire visuelle incomparable.

Catherine Rigollet

Archives expo à Paris

Infos pratiques

Du 19 mars au 23 juin 2024
BnF François-Mitterrand
Quai François-Mauriac – 75013
Du mardi au samedi, 10h-19h
Dimanche, 13h-19h
Tarifs : 10€/8€
www.bnf.fr


Visuels :

 Anaïs Boileau, Plis de soleil. Reflets de vies en Occitanie. Raymond Clavel chez lui, à Saint-Laurent-d’Algouze (Gard), 26 mars 2022.

 Aglaé Bory, Romy, Maud, Isadora et Sacha dansent en haut des escaliers de la dalle Maurice-Thorez à Bagnolet. Depuis trois ans, un groupe de danse contemporaine improvisée s’est constitué au conservatoire de danse de Bagnolet. Les jeunes filles créent des performances dansées qu’elles présentent dans l’espace public. Leur travail est une recherche sur la circulation et le mouvement dans l’espace et est empreint d’un grand souffle de liberté. Série « L’art en jeu : poétique de la ville » © Aglaé Bory / Grande commande photojournalisme.

 Samuel Kirszenbaum, Antonin, 15 ans, devant son tracteur, en juin 2022.
Série « Transitions » © Samuel Kirszenbaum / Grande commande photojournalisme.

 Philippe Brault, Les marins perdus. Hauts-de-France. Stephen, marin pêcheur sur le Don Lubi II, pendant la saison du homard. © Philippe Brault / Grande commande photojournalisme.

 Vues de l’exposition La France sous leurs yeux. © L’Agora des Arts.

« Ces photographies ont été produites dans le cadre de la grande commande nationale « Radioscopie de la France : regards sur un pays traversé par la crise sanitaire » financée par le Ministère de la culture et pilotée par la BnF. »