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Babel. Les artistes contemporains à l’assaut de la tour mythique

En 460 av.J.-C., Hérotode, « Le Père de l’Histoire », décrit la ziggurat Etemenanki édifiée deux siècles plus tôt à Babylone sous le règne de Nabuchodonosor II ; sa description deviendra le modèle des représentations de la Tour de Babel des artistes flamands. Un mythe puissant aussi est né, celui d’une ville bâtie après le déluge par une communauté d’hommes parlant le même langage, avec sa tour permettant d’accéder au ciel ; un péché d’orgueil que Dieu va punir par l’éparpillement des hommes sur la terre, la multiplication des langues et l’abandon de Babel, voire sa destruction selon certaines versions. Un mythe à différentes facettes qui va rester étonnamment vivant tout au long des siècles – et encore aujourd’hui. En prélude à l’exposition d’envergure internationale Les fables du paysage flamand au XVIe siècle, du merveilleux au fantastique : Bosch, Bruegel, Bles, Bril (du 6 Octobre 2012 au 14 Janvier 2013) qui révèle le caractère merveilleux et fantastique de ces paysages qui suscitent aujourd’hui encore fascination, effroi ou questionnement, le Palais des Beaux-Arts de Lille présente Babel ; exposition exclusivement contemporaine sur le thème de la plus célèbre allégorie architecturale. Le corpus de 85 œuvres (peintures, photographies, sculptures, installations, vidéos…) d’artistes internationaux illustre les multiples facettes du mythe babélien dans l’art d’aujourd’hui. Respectant l’évolution du récit biblique, cette sélection compose avec la symbolique de la Tour de façon allusive, décalée ou allégorique, en résonance avec notre monde actuel ; le chantier de la Tour, la sanction divine, la confusion des langues et la dispersion des peuples sont revus sous l’angle de l’histoire contemporaine, avec une inventivité souvent époustouflante et des créations d’une grande esthétique. John Isaacs a métamorphosé la tour en termitière. Jakob Gautel a repris la forme de la Babel hélicoïdale pour réaliser une sculpture de livres, métaphore de la bibliothèque universelle (voir la photo). L’artiste japonais Ryuta Amae propose une vision angoissante d’une tour pharaonique en construction, repoussant toujours plus haut les limites techniques. Dans ses grandes compositions photographiques en noir et blanc, le Chinois Zhenjun Du nous offre une Babel élitiste, monde d’en haut gouvernant une foule compacte et bigarrée qui grouille en bas. Yang Yongliang a anticipé le drame du World Trade Center dans ses deux montages photographiques de Heavenly City (1980) qui évoque aussi un champignon atomique enveloppant et pulvérisant une mégalopole pyramidale haute de plusieurs kilomètres. Pour les frères Jake et Dinos Chapman, leur Babel est devenu No Woman, No Cry (2009), l’enfer de la Shoa, une œuvre bouleversante peuplée d’une multitude de figurines en fibre de verre, théâtre de la cruauté des camps d’extermination nazis.

Catherine Rigollet

Visuel : Jakob Gautel, La Tour (Tour de Babel), 2006–2012 Collection de l’artiste © Jakob Gautel / DR

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 8 juin 2012 au 14 janvier 2013
Palais des Beaux Arts
Place de la République ‐ 59000 Lille
Lundi de 14h à 18h, du mercredi au vendredi de 10h à 18h, samedi et dimanche de 10h à 19h. Fermé le mardi.
Plein tarif : 9€ (exposition et musée)
Tél. 33 (0)3 20 06 78 00
www.pba‐lille.fr

 

 

 Catalogue : Babel, préface de Jean-Claude Carrière. Textes d’Alain Tapié et de Régis Cotentin. Invenit Editions, 98 pages, 12€.

 

 

 A voir aussi au Palais des Beaux-Arts, la magnifique exposition Fables du paysage flamand au XVIe siècle. Lire l’article.