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Françoise Pétrovitch : la dualité des existences

La Bibliothèque nationale qui possède des œuvres de Françoise Pétrovitch dans son fonds exceptionnel de plusieurs millions d’estampes, des origines jusqu’au XXIe siècle, a choisi de mettre en avant son œuvre graphique.

Dans son œuvre graphique et imprimé, comme dans ses peintures, sculptures et vidéos, Françoise Pétrovitch (née en 1964) questionne l’univers de l’enfance et de l’adolescence, la féminité ou encore l’intimité, dévoilant un monde oscillant entre rêve et réalité, tout en tension. « Des œuvres qui traversent ma vie », explique cette artiste qui a puisé notamment dans son quotidien des scènes sur la vie des enfants et surtout des adolescents correspondant aux inquiétudes et questionnements rencontrés à cet âge où tout peut arriver. Les éléments qu’on y distingue (personnages dédoublés, sans tête où la tenant entre leurs mains, corps sans jambes, coulures sanguinolentes, oiseaux morts…) renvoient à l’univers du conte et de la fable et résonnent comme autant de drames cachés ou imminents. Une intranquillité qui s’exprime également dans les figures animales et hybrides, dans toutes ces visages qui ne voient pas, les yeux bandés, masqués ou recouverts par les mains, dans cette peinture fluide, éthérée, fragile.

Derrière les paupières

Toutefois, il ne faut pas toujours y chercher un sens caché violent, ainsi dans ce portrait de son fils à la plage, à côté d’un personnage féminin sans tête (série Rougir, 2005), l’artiste explique que c’est elle, et qu’elle n’a pas eu envie de se représenter. C’est aussi sa part d’intime. Il y a toujours quelque chose d’autre derrière une image, « derrière les paupières », qui fera surgir des questionnements, sera interprété différemment par chaque visiteur. Une invitation à traverser les apparences. Ainsi Le Ventriloque, imposante pièce en céramique d’un personnage clownesque, grandes oreilles de lapin, yeux clos, étrange sourire aux lèvres, tenant une petite marionnette semble au premier regard inoffensif...mais entend en réalité évoquer « une situation de violence contenue, un rapport de force autour de la parole faussement accordée aux petits et aux démunis ».

Entendre les bruits du monde

De son attention portée aux autres et au quotidien des gens, à des gestes, des paroles entendues ou collectées, Françoise Pétrovitch a tiré de nombreuses séries. Comme « Entendre les bruits du monde ». Durant deux années, de mai 2000 à mai 2002, elle a réalisé Radio Pétrovitch s’astreignant à transcrire quotidiennement par un dessin la première information entendue le matin sur France Inter, puis à en réaliser un autre dans cette même journée, issu de son quotidien, mêlant ainsi le collectif et l’intime. Au total, 1 462 dessins publiés sous forme de livre d’artiste. Elle-même a illustré de nombreux livres d’écrivains, tel L’Abécédaire de Claude Piéplu, en 1994.
La Bibliothèque nationale qui possède des œuvres de Françoise Pétrovitch dans son fonds exceptionnel de plusieurs millions d’estampes, des origines jusqu’au XXIe siècle, a choisi de mettre en avant son œuvre graphique. « Il y a plus de difficultés et de contraintes dans la gravure et c’est ce qui m’intéresse » affirme l’artiste qui a découvert la gravure dès l’adolescence, transposant en estampe des gestes issus de la peinture et du dessin qu’elle pratique quotidiennement. Une centaine de pièces emblématiques de son travail graphique : estampes, livres d’artistes, dessins et croquis, œuvres anciennes ou très récentes, parfois inédites, de formats et de techniques variés sont exposées, complétée d’une douzaine de sculptures en faïence et en grès émaillé.

Catherine Rigollet

Visuels : Françoise Pétrovitch, Dans mes mains, 2019, lavis d’encre sur papier, 120 x 80 cm © BnF, département des Estampes et de la photographie. Photo : © L’Agora des Arts.
Françoise Pétrovitch, Nocturne, 2017, aquatinte en rouge, 66 x 50 cm, édition MEL Publisher © BnF, département des Estampes et de la photographie. Photo : © L’Agora des Arts.
Françoise Pétrovitch, dans l’exposition « Derrière les paupières ». Photo © L’Agora des Arts.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 18 octobre 2022 au 29 janvier 2023
BnF / François Mitterrand
Quai François Mauriac 75013
Du mardi au samedi :10h-19h
Le dimanche : 13h-19h
Fermé le lundi
Tarif : 10€/8€
https://bnf.fr