L’artiste émirien Hassan Sharif, né en Iran en 1951 d’un père boulanger, mort à Dubaï en 2016, a créé une œuvre globale d’une variété étonnante, et qui nous révèle une facette insoupçonnée de l’art contemporain dans les pays du Golfe. L’important corpus d’œuvres de Sharif réunit : dessins, caricatures, peintures figuratives, performances, sculptures et installations. Contrepied à cette foisonnante production, le titre de l’exposition au musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne (« I am the single work artist - Je suis l’artiste d’une œuvre unique ») « suggère que cet ensemble doit être compris comme un seul geste conçu dans la durée et la répétition ». L’exposition réunit cent cinquante de ses œuvres. Aux dessins, performances et expérimentations marqués par l’art conceptuel répondent des accumulations, découpages, tressages d’objets glanés dans les marchés (comme des jouets de plastique repeints par l’artiste ou des tongs), parfois déployés en des installations monumentales. En 2017 : L’immense installation Hassan Sharif Studio (Supermarket) (1990-2016) a été présentée à la Biennale de Venise.
Tout en revenant à la peinture figurative en 2000, Sharif a poursuivi son travail « d’archéologie urbaine » mené depuis 1982, critiquant la consommation outrancière, confrontant l’afflux d’objets, de marchandises et d’argent lié au pétrole, aux matériaux pauvres d’une population restée au bord de la modernité et de la richesse. Des matériaux simples mais colorés et beaux comme ces tissus, fibre de noix de coco, cordes que Hassan Sharif tresse, noue, « sculpte » et met en scène telles des œuvres d’art.
Parallèlement à son activité artistique, Hassan Sharif a écrit de nombreuses tribunes sur l’art dans des quotidiens pour faire face à la pénurie de littérature culturelle dans son pays. Et a participé à des créations d’ateliers ou de collectifs à Dubaï pour soutenir les jeunes artistes et leur permettre d’exposer.
Un artiste peu connu en France dont la richesse et l’acuité de l’œuvre séduiront même ceux qui ne sont pas des adeptes de l’art conceptuel.
C.R
Visuels : Slippers and Wire, 2009. Tongs et fil de cuivre, dimensions variables, collection de la Sharjah Art Foundation, © H. Sharif, photo : A. Mole/MAMC+
Vue de l’exposition. Au mur à g. : Colors, 2016 © H. Sharif, collection de la Sharjah Art Foundation, photo : A. Mole/MAMC+
