Tout comme Lucian Freud, son concitoyen, disparu en 2011, Howard Hodgkin (né en 1932) reste imperméable aux modes, tendances et diktats de la scène artistique contemporaine. Hodgkin reste résolument un peintre abstrait avec une palette quasi-expressionniste. Si on a pu découvrir vingt-cinq de ses œuvres à Toulouse en 2013, on l’a peu vu à Paris et l’exposition est donc bienvenue. « Je peins des images qui représentent des moments d’émotions, » dit-il. Sur les murs blancs de la galerie, alternent petits tableaux et plus grands formats, tous marqués par ces grands balayages spontanés de couleurs, si caractéristiques du style de l’artiste. La toile ici est en bois –bois blanc ou contreplaqué – prolongée parfois par un cadre assemblé ou rajouté sur laquelle la peinture peut déborder. Sur le contreplaqué, laissé brut lorsque la peinture ne couvre pas tout le tableau, les huiles prennent des transparences d’aquarelle. La facilité de ce travail n’est qu’apparente. L’artiste pense et repense l’œuvre à venir maintes fois avant de poser le pinceau sur le bois. À voir les œuvres, on peut soit laisser la bride à son imagination, soit se pencher sur la liste des titres : on y découvre un peintre voyageur (ici en Inde et en Normandie), sensible aux formes, aux couleurs, aux instantanés de l’œil, aux émotions de la vie. On croit même goûter l’iode de ses océans, les saveurs de ses étals, la chaleur de ses climats. Et pour conclure, For Matisse. Titre révélateur. Une fenêtre dans une chambre aux couleurs fauves s’ouvre sur un horizon d’or (difficile de ne pas penser à van Gogh), une invitation à poursuivre le voyage. Ne pas hésiter !
Elisabeth Hopkins
Visuel : Howard Hodgkin, Indian Waves, 2013-2014. Huile sur bois, 22,9 x 30,5 cm. ©Howard Hodgkin. Courtesy Gagosian Gallery.
