Lacroix, Pascal - Plasticien céramiste

à l’atelier.

à l'atelier.

binôme IPN. grès émaillé. 2021. h 27 x 65

binôme IPN. grès émaillé. 2021. h 27 x 65

3. « déconstruction 1 » . rouillé. grès émaillé. 2023.

3. « déconstruction 1 » . rouillé. grès émaillé. 2023.

binôme IPN. grés émaillé. 2023.

binôme IPN. grés émaillé. 2023.

binôme IPN. grés émaillé. 2023.

binôme IPN. grés émaillé. 2023.

IPN. 4 éléments rouillés. grès émaillé. 2021.

IPN. 4 éléments rouillés. grès émaillé. 2021.

poings levés. grès émaillé. 2021.

poings levés. grès émaillé. 2021.

pièce totémique. « metropolis » grés émaillé. 2015. 75 x 45 cm.

pièce totémique. « metropolis » grés émaillé. 2015. 75 x 45 cm.

détail pièce totémique.

détail pièce totémique.

rouleau mécanique. grès émaillé. 2018.

rouleau mécanique. grès émaillé. 2018.

2 rouleaux mécaniques. grès émaillé. 2015.

2 rouleaux mécaniques. grès émaillé. 2015.

pièce sur le tour avant séchage.

pièce sur le tour avant séchage.

pièce totémique rouillée. grès émaillé. 2021.

pièce totémique rouillée. grès émaillé. 2021.

à l’atelier.

à l'atelier.

Terre d’acier

Pascal Lacroix transforme le constat grinçant de la dureté du travail à la chaîne et du chômage dans la société industrielle mondialisée en œuvres d’art, qui s’imposent indépendamment du propos et interrogent la notion du beau.

Depuis 2018, Pascal Lacroix a abandonné ses créations en grès et porcelaine émaillées au rouge de cuivre, à vocation essentiellement usuelle et décorative, pour se lancer dans une figuration narrative à la fois expérimentale et engagée socialement : rendre hommage, dans des sculptures en céramique, à la mémoire d’une longue histoire industrielle de sa région du Fumélois (Lot-et-Garonne), à « l’art de faire » de ses ouvriers, à leurs espérances et déconvenues.
De cette histoire (l’arrêt en 2018 à Fumel de la sidérurgie avec la fermeture de Métal Aquitaine, ses licenciements et ses luttes ouvrières pour sauver cette usine d’où sont sortis entre autres les tuyaux du Centre Pompidou !) qui a nourri sa réflexion et sa sensibilité d’artiste engagé, a émergé une impressionnante série d’œuvres inédites aux formes symboliques évoquant la poutre d’acier IPN. Architecture froide du H (ou du I), roulée et enveloppée de la douceur de la texture du grès émaillé.
Une fascinante fusion formelle, à la fois épurée et brutaliste, noire ou teintée d’une « rouille » archéologique. Tournées, modelées ou extrudées, les différentes pièces qui composent cette série de « terre-acier » à l’abstraction géométrique s’assemblent ou s’imbriquent par deux ou trois. Certaines dressées, lèvent le poing en signe de révolte et de liberté, lointain héritage légué par le graphiste communiste John Heartfield, membre du mouvement Dada qui a créé à partir d’un dessin de Georges Grosz de 1922 cette forme liée à l’expression élémentaire de la colère ouvrière (série des Poings levés).

De sa créativité stimulée par l’univers mécanique sont nés aussi de hauts rouleaux mécaniques de près d’un mètre de haut, composés de disques indépendants et dentés d’excroissances tranchantes inspirés par les rouages des brise-mottes agricoles (série des Rouleaux mécaniques). Un surprenant trompe-l’œil imitant à la perfection l’acier. Il y a du Fritz Lang et du Charlie Chaplin chez Pascal Lacroix qui, comme Métropolis ou Les Temps Modernes transforme le constat grinçant de la dureté du travail à la chaîne et du chômage dans la société industrielle mondialisée en œuvres d’art, qui s’imposent indépendamment du propos et interrogent la notion du beau.

D’autres pièces longues et fuselées se couvrent de signes totémiques évoquant le féminin et le masculin. D’autres encore s’apparentent à des sculptures cubistes avec leur fût central réalisé au tour et paré d’entailles, de filetages et d’excroissances anguleuses formant de surprenant portraits minimalistes à la manière de Braque ou Picasso (série des Portraits). Une référence au corps, ou plutôt à l’humain, qui habite l’œuvre de Pascal Lacroix depuis ses vases en porcelaine sur lesquels s’esquissaient des silhouettes, et qui aujourd’hui s’insinue plus profondément dans la matière.

Originaire de Laon dans l’Aisne, installé à Tournon d’Agenais en 1986, Pascal Lacroix y a même ouvert une galerie à côté son atelier, y présentant régulièrement ses œuvres, mais invitant aussi à découvrir d’autres artistes dont il se sent proche ou qu’il admire, comme il le fit, durant l’été 2023, en exposant l’œuvre d’Adolphe Cieslarczyk (107 ans !), un ex-tourneur-fraiseur de Pont-à-Mousson, formé ensuite par Victor Prouvé aux beaux-arts de Nancy et devenu artiste peintre, graveur et sculpteur proche de l’abstraction géométrique. Un artiste, lui-aussi inspiré par les IPN, mais qui a choisi l’acier pour s’exprimer et jouer avec les innombrables possibilités d’assemblage.

Si Pascal Lacroix joue aussi avec les assemblages de pièces, réfléchissant aujourd’hui à former des chaos, ce céramiste, tourneur et émailleur pourtant rompu depuis des années à la pratique, doit toujours faire face à d’importantes contraintes techniques ; la terre, à la différence de l’acier, supportant difficilement les tensions survenant lors de la cuisson, avec les aléas qui en résultent. « Des difficultés qui trouvent toujours une solution...après quelques nuits blanches d’intenses cogitations ». Mais cette forme d’aventure technique intimement liée à la réflexion esthétique, Pascal Lacroix en assume l’errance, les risques et les surprises, poursuivant avec toujours la même inspiration et le même puissant souffle artistique son immense travail mémoriel et artistique.

Catherine Rigollet