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Les Olmèques et les cultures du Golfe du Mexique

Dans les jardins du musée du Quai Branly, une tête monumentale de près de 2 mètres de haut accueille le visiteur de l’exposition sur les Olmèques. Monumentalité, c’est ce qui frappe d’emblée dans l’art Olmèque constitué de têtes, mais aussi de stèles cérémonielles et de sculptures en pierre représentant des dieux ou des dirigeants. Quelque 300 pièces, soit près de 20 tonnes ont fait le voyage depuis le Mexique jusqu’à Paris pour cette exposition inédite en Europe qui dévoile la richesse culturelle de la civilisation olmèque qui s’est épanouie, entre 1 600 et 400 avant notre ère, dans la plaine côtière fertile au sud des états actuels de Veracruz et de Tabasco.

D’où viennent les Olmèques dont il ne nous reste que des vestiges ? D’Afrique, d’Asie ? Rien dans l’origine du mot ne l’indique car il est repris du mot nahuatl Olmeca employés par les Mexicas, trois millénaires après l’épanouissement de cette civilisation, pour parler des différents peuples de « la région où il y a du caoutchouc ». De cette civilisation à l’écriture plus ancienne que celle des Mayas, constituée de glyphes ressemblant à des objets et organisés verticalement et horizontalement, nous pouvons en tout cas admirer les œuvres d’art retrouvées grâce aux fouilles archéologiques sur les sites de leurs anciennes cités telles La Venta et San Lorenzo. Des œuvres d’une beauté fascinante tant par leur qualité d’exécution que par leur richesse symbolique. Des symboles intrigants comme ces larges bouches ouvertes sur les visages ou cette cavité creusée sur les ventres servant peut-être à accueillir des offrandes. Parmi toutes ces sculptures, « plusieurs sont des chefs-d’œuvre », souligne Emmanuel Kasarhérou, nouveau président du musée du Quai Branly, citant ce Señor de Las Limas, sculpture en jadéite représentant un homme (un prêtre peut-être), assis en tailleur, portant dans ses bras un bébé jaguar aux traits humanoïdes (le jaguar occupe une place centrale dans l’iconographie olmèque). Une sculpture trouvée sur le site de Las Limas, « époustouflante d’équilibre et de raffinement ». On ne manquera pas ce groupe de seize figurines miniatures regroupées autour de six haches polies ; une offrande prestigieuse découverte en 1955, sur le site de la Venta. L’ensemble est réalisé en serpentine, granit et jade, cette pierre semi-précieuse d’une grande valeur symbolique chez ces peuples d’agriculteurs de Mésoamérique par sa couleur verte ou bleutée associée à l’eau et assimilée en particulier au maïs qui lève.

Si le déclin des Olmèques a commencé vers 500 avant notre ère, le rayonnement de leur civilisation s’est étendu au-delà de leurs frontières, dans les régions du Guerrero, du Morelos, du Mexique central, du Chiapas, au Guatemala et au Costa Rica et s’est perpétué plus tard chez les Huastèques, au nord de l’État du Veracruz. Leur art statuaire, très proche par ses figures humaines colossales, ses haches en pierre polie, ses objets en bois et en jade, ses balles en caoutchouc est particulièrement bien présenté dans l’exposition. Certaines pièces sont exceptionnelles comme cet Adolescent huastèque nu, les épaules et le côté droit du corps recouverts de superbes motifs gravés probablement associés au culte du maïs et au dieu Quetzalcóatl (le serpent à plumes). Son front aplati vers l’arrière de la figure est un indice de la pratique de la déformation crânienne couramment pratiquée au sein de cette culture.

En fin de parcours, nous faisons un bond en avant de mille ans par rapport aux sculptures massives du début avec cette somptueuse statue huastèque de Femme scarifiée (vers 200 de notre ère, site de Tamtoc) qui tranche par le réalisme et l’élégance de ses formes. Elle a été retrouvée brisée – intentionnellement sans doute- et placée dans un bassin d’eau rituel, comme une offrande. Mais comment était sa tête disparue ? Avec des traits africains comme celle du géant de San Lorenzo ? Ou avec les yeux bridés comme beaucoup d’autres statues (le Lutteur par exemple ou cette étonnante figurine creuse en céramique du type Baby-face trouvée sur le site de Tlapacoya) ? Il reste tant de mystères encore à percer sur les Olmèques et les autres cultures précolombiennes du Golfe du Mexique.

Catherine Rigollet

Visuels : Tête colossale n°4, 1200 -900 av. J.- C. Site de San Lorenzo Tenochtitlan, État du Veracruz, Mexique. Basalte. Museo de Antropología de Xalapa - Universidad Veracruzana, Xalapa, État du Veracruz, Mexique © Catálogo Digital Museo de Antropología de Xalapa. Universidad Veracruzana, D.R. Secretaría de Cultura-INAH.
Offrande 4 du site de La Venta. Ensemble de 16 figurines et 6 haches-stèles miniatures, 800-600 av. J.-C., site de La Venta, État du Tabasco, Mexique. Jade, serpentine et granit. Museo Nacional de Antropología, México, Mexique © D.R. Secretaría de Cultura-INAH / Archivo Digital de las Colecciones del Museo Nacional de Antropología-INAH-CANON.
Sculpture dite « La Femme scarifiée ». Figure féminine, vers 200 après J.-C. Site de Tamtoc, État de San Luis Potosi, Mexique. Grès. © D.R. Secretaría de Cultura-INAH / Archivo Digital de las Colecciones del Museo Nacional de Antropología-INAH-CANON.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 9 octobre 2020 au 25 juillet 2021
Musée du quai Branly – Jacques Chirac
Mezzanine Est
37, quai Branly 75007, Paris
218, rue de l’Université 75007, Paris
Mardi, mercredi, vendredi, samedi et dimanche de 10h30 à 19h
Nocturne le jeudi jusqu’à 22h
Fermeture le lundi sauf pendant les petites vacances scolaires
Expo + coll. permanentes : 12 € (plein tarif)
www.quaibranly.fr