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Ugo Schiavi. Gargareôn

Fasciné par les civilisations anciennes, le jeune artiste Ugo Schiavi (né en 1987 à Neuilly-sur-Seine) a choisi de se mesurer à la dimension du patrimoine d’art. N’hésitant pas à produire des télescopages de temporalité et de civilisation allant de la culture antique à celle de la production industrielle au caractère éphémère. Explorant le passage du temps et la vacuité des passions et activités humaines. Ce thème de la vanité si bien interprété récemment par son spectaculaire Le Naufrage de Neptune, une statue du Dieu de la mer dressée sur un bateau de commerce rouillé, échoué sur la fontaine de la place Royale ; une installation créée dans le cadre de l’événement « Voyage à Nantes » 2021.

Installé à Marseille après ses études à l’école nationale supérieure de Nice – Villa Arson, Ugo Schiavi, poursuit dans ses récentes créations ses recherches et expérimentations sur ces questions relatives à l’hybridation. Il moule et greffe des éléments contemporains à des morceaux de statuaire antique, concevant des chimères formées d’objets et de matériaux hétérogènes comme contaminés par l’ère de l’Anthropocène. C’est ainsi qu’apparaît au cœur de l’ancien Grand Prieuré des chevaliers de Malte qui accueille sa dernière exposition, l’inquiétant Gargareôn-Navigator, tirage en résine acrylique d’un moulage sur une gargouille médiévale (conservée au musée Réattu) vomissant de ses entrailles une mousse verte en polyuréthane. Ce gargareôn (racine grecque du mot gorge), renvoie aux gargouilles dont l’artiste a utilisé les formes dans une vingtaine d’autres œuvres. Des gargouilles du Grand Prieuré, que l’artiste, en résidence au musée Réattu durant l’année 2021, a moulées sur place afin d’en réaliser différents tirages, puis hybridées avec des moulages provenant d’autres sculptures et des matériaux divers, réactivant les fonctions à la fois pratiques et symboliques ancestrales de ces objets : orner, effrayer, faire circuler l’eau. Comme celle du Rhône qui coule à proximité, fil rouge de l’exposition, renvoyant à une archéologie marine. Nous rappelant au passage qu’avant d’être élevé au rang de trésor, le matériel archéologique qui est trouvé dans le Rhône fut souvent un détritus antique ou médiéval promis à une archéologie du futur, comme ceux que le fleuve continue de charrier.

C’est aussi ce qu’évoque son film Main-Stream-Memory, co-réalisé avec l’artiste Jonathan Pêpe. Une fiction qui nous emmène au cœur d’un îlot flottant à la dérive et constitué de fragments d’architecture (du Grand Prieuré d’Arles, des lions du pont de Lunel et des arcs-boutants de l’église des Frères Prêcheurs, photographiés à l’aide d’un drone), de vestiges archéologiques et de déchets contemporains, traversant une ville d’Arles partiellement engloutie sous des eaux troubles. Une exposition d’une tragique beauté.

Catherine Rigollet

Visuels : Ugo Schiavi, Gargareôn Navigator, 2021 – Musée Réattu – Arles. Photo © Ugo Schiavi.
Ugo Schiavi, Sans titre (Gorgone), 2021 © Ugo Schiavi 2021. Photo musée Réattu.
Ugo Schiavi et Jonathan pêpe, Main-Stream-Memory, 2021 © Ugo Schiavi 2021.

Archives expo en France

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 6 novembre 2021 au 15 mai 2022
Musée Réattu - Musée des beaux-arts
Ancien Grand Prieuré de l’Ordre de Malte
10 rue du Grand prieuré - 13200 Arles
Tous les jours, sauf lundi : 10h - 17h
Jusqu’à 18h du 1er mars au 31 octobre
Tarifs : 6€/4€
www.museereattu.arles.fr