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Niki de Saint Phalle. Visionnaire, subversive et joyeuse

Niki de Saint Phalle (1930-2002) est l’une des femmes artistes les plus célèbres de sa génération et est considérée comme une représentante principale du Pop Art européen et une cocréatrice du Happening. Artiste visionnaire, elle a développé un vocabulaire de design distinctif et a créé une œuvre aussi non conventionnelle que multiforme. Les Nanas, ses figures féminines colorées et grand format, ont jeté les bases de son succès international et sont toujours considérées comme sa marque de fabrique. Mais le spectre créatif de l’artiste autodidacte est beaucoup plus large, et son œuvre est plus subversive et critique de la société qu’on ne le suppose généralement.

De ses premières peintures à ses sculptures à grande échelle, cette vaste exposition au SCHIRN met en lumière le travail de cette artiste hors du commun. Niki de Saint Phalle a développé son art basé sur le traitement d’émotions très personnelles et sur une position radicalement féministe. Elle a abordé des sujets sociaux et politiques, critiqué les institutions et les modèles et, avec son art, abordé des discours publics qui sont encore pertinents aujourd’hui. Ses légendaires Shooting Pictures (en lien avec sa détestation de son père incestueux https://lagoradesarts.fr/-Niki-de-Saint-Phalle-Nana-a-vif-.html ) ont été créées lors de performances provocantes, et ses impressionnantes installations dans l’espace public témoignent de l’impact transformateur de son art, qui s’est développé à travers la peinture, le dessin, les assemblages, les actions, ainsi que dans le théâtre, le cinéma et l’architecture.

Avant même de photographier, Saint Phalle s’était entièrement consacrée à l’art. Après un traitement pour une dépression nerveuse en 1953, elle se concentre d’abord sur la peinture. Afin de pouvoir travailler en tant qu’artiste, elle s’est finalement séparée de son mari Harry Mathews et de leurs deux enfants en 1960. À Paris, elle rencontre son compagnon artistique et partenaire de longue date Jean Tinguely, avec qui elle réalise par la suite de nombreux projets. À partir de 1963, ils vivent ensemble en France et aux États-Unis. Après ses premières peintures, l’artiste autodidacte travaille à partir de 1958 sur des assemblages et des paysages, dans lesquels elle intègre de la vaisselle cassée et des objets du quotidien tels que des rasoirs, des gants et des objets en plastique (y compris des pistolets jouets). Inspirée par l’art contemporain, elle expérimente différentes techniques, comme dans Nightscape (1959), où elle utilise à la fois une technique de goutte à goutte influencée par Jackson Pollock et l’ancienne technique de mosaïque mauresque utilisée par Antoni Gaudí. Elle s’inspire également des influences de Jean Dubuffet, des collages surréalistes, du néo-dada et de la peinture naïve. À partir de 1963, ses assemblages deviennent plus figuratifs et explorent l’identité féminine. En 1965, elle lance sa nouvelle série Nanas à Paris, qu’elle décrit comme une « célébration jubilatoire des femmes » proclamant un matriarcat libéré de l’oppression. Après 1975, elle se concentre sur le Jardin des Tarots, finançant elle-même ce projet à grande échelle construit en Toscane, aidée par des amis artistes dont Jean Tinguely, Seppi Imhof et Rico Weber. Le jardin a été ouvert le 15 mai 1998 et comprend vingt-deux sculptures monumentales recouvertes de mosaïques de pierres colorées et de tessons de céramique et de miroirs à l’instar du Cyclop de Milly La Forêt (https://lagoradesarts.fr/-Le-Cyclop-de-Tinguely-et-Niki-de-Saint-Phalle-.html). Un parcours initiatique où se croisent la vie, la mort et l’amour au travers de mythes et légendes composites, et où on retrouve l’influence de l’architecture de Gaudì comme celle du facteur Cheval.

« Niki de Saint Phalle continue de nous fasciner aujourd’hui par son énorme pouvoir créatif et le large spectre de son expression artistique, souligne Katharina Dohm, commissaire de l’exposition. Elle défie sans compromis les conventions sociales rigides de son époque et les règles dominantes du monde de l’art. Son envie artistique de créer a été nourrie par sa rage contre une société imprégnée de structures patriarcales, qu’elle a contestée avec son travail ouvert et provocateur. Des représentations à la fois joyeuses et macabres et un sens aigu de l’ambiguïté du bien et du mal imprègnent toute son œuvre ».
Ces dernières décennies seront celles de l’engagement en faveur des grandes causes : lutte contre le sida, contre l’absence de réglementation de l’industrie de l’armement, pour l’avortement et le droit des femmes à l’autonomie corporelle et à l’autodétermination.

Catherine Rigollet

Visuels : Les Nanas au pouvoir, 1965. Temple of All Religions, 1974–1988).

Archives expo en Europe

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 3 février au 21 mai 2023
Schirn - Römerberg
60311 Frank¬furt
Tuesday and Sunday 10am – 7pm
Wednesday – Saturday 10am – 10pm
Tarifs : 16€/14€
https://www.schirn.de/en/exhibitions/2023/niki_de_saint_phalle/