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Son œil dans ma main. Algérie 1961-2019. Raymond Depardon / Kamel Daoud

L’exposition « Son œil dans ma main » offre un témoignage sur l’Algérie, photographiée en 1961, puis en 2019, par Raymond Depardon (né en France en 1942), avec des textes de l’écrivain Kamel Daoud (né en Algérie en 1970, après l’indépendance de son pays), qui font directement -ou pas- écho aux images du photographe. Deux regards qui s’enrichissent et questionnent l’histoire de l’Algérie qui célèbre le 60e anniversaire de son indépendance.

Entre le printemps et l’automne 1961, Raymond Depardon, alors tout jeune photographe de 19 ans, réalise plusieurs reportages à Alger pour l’agence Dalmas. Il n’a aucune attache algérienne, lui le fils de cultivateurs de la vallée de la Saône, c’est donc sans nostalgie, avec sa singularité, ses préjugés peut-être aussi, qu’il saisit des scènes de la vie quotidienne, beaucoup de vues de gens dans les rues où deux mondes se côtoient, déambulant sans se préoccuper de l’autre (Square Guynemer, Alger 1961), mais où les tensions sont parfois palpables (photo d’un sigle OAS sur un mur de la Casbah d’Alger ; militaire patrouillant) et où les photographes ne sont pas toujours les bienvenus, se souvient Depardon.
Il est aussi accrédité pour suivre les premières négociations entre la France et les représentants du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) pour mettre fin à la guerre d’Algérie, à Évian, en mai-juin 1961. Près de soixante ans plus tard, Depardon retourne en Algérie pour une nouvelle série de photographies de rues, toujours en noir et blanc, montrant notamment la jeunesse algérienne qui se promène, des femmes attablées au café. Les photographies n’ont jamais rien d’innocent, elles sont le lieu de toutes les subjectivités. Toute la question est celle de l’interprétation qui est faite des clichés et du sens qui leur est donné. Il y a ce qu’on voit, et ce qu’on ne voit pas.

En 2019, ce deuxième reportage achevé, Depardon retrouve comme prévu Kamel Daoud à Oran où il habite. Journaliste algérien d’expression française, chroniqueur réputé, il s’est fait connaître du grand public français avec son roman Meursault, contre-enquête (2013-2014). Puis s’est distingué par son franc-parler, s’agissant notamment de la place de la religion et de celle de la femme dans le monde arabe. Les deux hommes vont concrétiser leur projet d’un livre à quatre mains à partir des reportages de Depardon, « illustrés » par la libre plume de Daoud.
L’exposition, montée à partir de leur ouvrage (publié aux éditions Barzakh) offre une déambulation entre 1961 et 2019, entre photos et textes. Deux regards sur l’Algérie, l’un extérieur et l’autre intérieur, forcément subjectifs, mais qui ont le mérite de nous pousser à revisiter l’histoire de l’Algérie qui célèbre le 60e anniversaire de son indépendance. Un film inédit avec Raymond Depardon et Kamel Daoud, réalisé à l’Institut du monde arabe par Claudine Nougaret, conclut le parcours.

Catherine Rigollet

Visuels : Square Guynemer, Alger, 1961.
Alger, 2019. © Raymond Depardon / Magnum photos.
Raymond Depardon et Kamel Daoud, IMA, 7 février 2022. © C.R

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 7 février au 31 juillet 2022
Institut du monde arabe
1, rue des Fossés-Saint-Bernard 75005
Du mardi au dimanche, 10h-18h
Week-end : jusqu’à 19h
Tarif plein : 8€
www.imarable.org


 Tout au long de l’année 2022, l’IMA met l’Algérie en lumière avec des expositions (dont « Algérie mon amour » sur les liens de fraternité entre artistes et intellectuels algériens et français. Du 15 mars au 31 juillet), des conférences, des films, des rencontres…