Vous consultez une archive !

Seydou Keïta. Rendre les gens beaux

« Quiconque n’a pas été pris en photo par Seydou Keïta n’a pas de photo », déclare-t-on à Bamako dans les années 1950. Des milliers de Maliens et de voyageurs d’Afrique de l’Ouest viendront se faire portraiturer par Seydou Keïta (c.1921 - 2001) entre 1948 et 1962, dans son petit studio de Bamako - alors ancienne capitale du Soudan français. Ébéniste pour vivre, il est devenu photographe vers 1935, lorsque son oncle, de retour d’un séjour au Sénégal, lui a rapporté un Kodak Brownie Flash. Le déclic. En 1948, il crée son propre studio.

Devenu un portraitiste talentueux, loin des stéréotypes et des photos codifiées à vocation anthropologique prises lors de la période coloniale, il a surtout le désir de rendre les modèles vivants et beaux. Il met à disposition des gens qui viennent se faire photographier (seul ou en groupe) des vêtements chics -si nécessaires-, des accessoires, des bijoux. Il utilise de beaux tissus pour les fonds et fait preuve d’inventivité pour les mises en scènes. De ses portraits se dégagent une clarté et une netteté incroyable, une douceur aussi et beaucoup de respect envers ses modèles. « J’étais capable d’embellir quelqu’un. À la fin, la photo était très belle. C’est pour ça qu’à la fin, je dis que c’est de l’Art », disait-il sans forfanterie.

Keïta travaille à la lumière naturelle pour des raisons économiques, son studio étant dans sa cour, et il ne prend qu’un seul et unique cliché en noir et blanc avec une chambre photographique 13 x 18, faisant jaillir l’âme d’un être unique. Les clients font la queue pour se faire photographier, séduits par les tirages tamponnés au format carte postale qu’ils peuvent envoyer à leurs proches. Lui garde précieusement les négatifs...Ce qui nous permet aujourd’hui d’admirer ses portraits en grand format.
Des photographies qui constituent aussi un témoignage unique des changements de la société malienne à la fin de la période coloniale et des sources documentaires d’exception ayant marqué un tournant dans la photographie d’Afrique de l’Ouest.

Catherine Rigollet

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 5 mai au 15 juillet 2023
Galerie Nathalie Obadia
3, rue du Cloître Saint-Merri 75004
Du lundi au samedi, 11h-19h
Entrée libre
https://www.nathalieobadia.com


Visuels :
 Seydou Keïta, Sans titre, 1948-1954. Posthumous silver print, 55 x 65,5 x 3,4 cm. Courtesy galerie Obadia.
 Seydou Keïta, Sans titre, 1959. Posthumous Gelatin black and white silver print on cartoline paper 280g, anti-reflective and anti-UV glass framed (small format)
65.5 x 55.2 x 3.4 cm. Édition 3/10. Courtesy galerie Obadia.