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Victor Horta : de l’Art Nouveau à l’Art Déco

On le considère comme le chef de file des architectes de l’Art nouveau en Belgique, une étiquette certes utile, mais parfois réductrice, il se définissait d’ailleurs comme « gothique moderne ». Cette exposition offre un autre regard sur Horta.

Né à Gand, fils de cordonnier, Victor Horta (1861-1947) est d’un caractère rebelle, entretient des relations houleuses avec ses parents, notamment sa mère. Il refuse d’étudier le droit ou la médecine, préférant l’architecture et le violon, s’inscrit à la section d’architecture de l’Académie des Beaux-Arts de Gand. Puis il part à Paris dans l’atelier d’un architecte décorateur : Jules Debuysson. Il y découvre les principaux mouvements picturaux (impressionnisme, pointillisme...), mais aussi l’architecture classique et surtout les nouveaux matériaux de construction, en particulier l’acier et le verre. « Mon séjour à Paris, mes promenades, la visite des monuments et des musées avaient ouvertes toutes grandes les portes de mon cœur d’artiste. Aucune école n’aurait pu mieux m’enseigner l’enthousiasme de l’architecture que la vue, la lecture des monuments m’a donné et qui m’est resté pour toujours », écrit-il dans ses mémoires. De retour à Bruxelles, il se forme à l’Académie royale des beaux-arts. En 1884, il remporte le premier prix Godecharle d’architecture avec un projet de Parlement. Puis commence à construire. Son entrée dans le cercle clos de la loge franc-maçonnique lance sa carrière. Les bourgeois de Bruxelles qu’il côtoie lui passent commande.

Dès 1892, il se libère de la réplique servile des motifs anciens, s’inspire dans son vocabulaire de l’Égypte ancienne, de l’époque gothique ou du style rocaille, mais en s’appropriant, déclinant et transformant à sa manière les motifs pour conférer à son art une dimension personnelle. Si ses motifs décoratifs sont inspirés de la nature, il leur donne une manière nouvelle et abstraite, préférant la tige et le bouton à la fleur éclose. De cette époque date l’Hôtel Tassel (1893), considéré comme la première maison de l’Art nouveau à Bruxelles ; l’une de ses quatre constructions majeures avec l’Hôtel Solvay (1894), l’Hôtel van Eetvelde (1895) et sa propre maison-atelier (1898), devenue musée Horta en 1969. Toutes quatre inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il y a introduit le plan libre, la diffusion de la lumière au travers de l’ensemble de la construction, la décoration aux lignes courbes qui amplifient l’impression d’espace, l’utilisation du verre et de l’acier et l’introduction d’installations techniques modernes. À côté de ces hôtels particuliers, Horta construit aussi des grands magasins : les anciens magasins Wolfers frères, le Grand Bazar d’Anspach, le tristement célèbre À l’Innovation détruit par un incendie en 1967 (causant la mort de 251 personnes), et les anciens magasins Waucquez aujourd’hui transformé en Centre Belge de la Bande Dessinée.

Son style évolue ensuite vers une plus grande sobriété, au moment où il se tourne aussi vers l’enseignement (il dirige l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles). Forcé de s’exiler en 1914-1918 aux États-Unis, il revient en abandonnant l’« Art Nouveau » pour un retour vers un art plus géométrique, prémices de l’Art Déco, comme en témoignent ses œuvres tardives comme le palais des Beaux-Arts et la gare Centrale. Mais il ne négligera jamais les décors intérieurs : peintures, vitraux, escaliers, ferronneries, tables, chaises, lampes...

Présentée au musée Horta, dans la maison de l’architecte (agrandie en 2016 avec l’immeuble mitoyen (n° 27) édifié par Jules Brunfaut vers 1903-1904), l’exposition Victor Horta Versus Art Nouveau. Horta’s vocabulary révèle donc un architecte beaucoup plus éclectique que l’on ne croit. Elle éclaire aussi sur sa vie privée (plutôt triste), sur sa personnalité (intègre, exigeant, pointilleux, et qui détruisit une énorme quantité de ses dessins, croquis et archives), sur l’influence de ses mentors : Alphonse Balat et Viollet-le-Duc…Elle donne surtout envie de partir à la découverte de ses architectures, sachant que de nombreuses furent détruites (telle la Maison du peuple) une fois passée la vogue du « style nouilles » comme ironisaient ses détracteurs en raison de la suprématie des arabesques sur les lignes droites. Des balades à Bruxelles dans le Horta Art Nouveau et Art Déco, dont on trouvera les cartes sur le site du musée.

Catherine Rigollet

Archives expo en Europe

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 24 mars 2023 au 8 janvier 2024
Musée Horta
27, rue Américaine
Quartier St Gilles - Bruxelles
14h à 17h30 du mardi au vendredi
11h à 17h30 le W.E
Tarif plein : 12€
www.hortamuseum.be


Visuels :

 François Schuiten, portrait de Victor Horta, Tous droits réservés.

 Façade du Musée Horta au n°25 et de son extension à droite, au n°27 ©D.R

 Escalier Hôtel Tassel par V. Horta ©D.R

 Victor Horta, lanterneau de l’Hôtel Solvay, 1895.

 Palais des beaux-arts de Bruxelles. Photo 1928. ©D.R