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Zoran Music et Fred Deux. Des proximités inattendues

Malgré deux approches différentes, à travers l’apparence pour l’italo-slovène Zoran Music, le ressenti de la vie intérieure pour le français Fred Deux, les œuvres de ces artistes solitaires se répondent et s’enrichissent, avec des proximités inattendues. Solidement inscrites dans l’histoire de l’art, elles le sont aussi dans celle du XXe siècle. Deux œuvres tourmentées, empreintes de souffrances et de tragédies, mais où humanité et nature tentent de prendre le dessus. Deux guetteurs du vivant, vaille que vaille.

Fred Deux (1924-2015) a consacré 65 ans de son existence au dessin, sept jours par semaine, se réveillant la nuit pour vérifier « si le dessin était content ». C’est celui-ci, disait-il également qui « conduisait ma main ». Dans un fin et obsessionnel maillage graphique, d’où émergent çà et là quelques formes mystérieuses, Fred Deux semble murmurer ses pensées. Son œuvre, inspirée par celle de Paul Klee, le peintre de sa vie à qui il doit sa voie, a toujours été vouée à l’introspection, comme pour expulser des angoisses toujours enfouies. Celles qui le taraudaient enfant lorsqu’il habitait avec sa famille dans une cave de Boulogne-Billancourt, envahie par l’eau et les rats lors des crues de la Seine, celles vécues plus tard face à la maladie et à la crainte de la faucheuse ; des tourments que cet artiste-philosophe a aussi évoqués dans ses écrits, notamment son livre le plus important : La Gana (1957), roman largement autobiographique.

L’œuvre de Zoran Music (1909-2005) fut dominée par les dessins que, déporté, l’artiste fit au camp de Dachau en 1945, des images insoutenables de l’extermination et des montagnes de cadavres qui ressurgirent dans son œuvre, à partir de 1970, dans le cycle « Nous ne sommes pas les derniers ». Mais Music, c’est aussi des dessins archaïsants qui ont suivi ces années de plomb, avec les séries de chevaux, de collines toscanes, de visions de Venise…

Cette exposition propose un dialogue entre une vingtaine d’œuvres de Zoran Music, des peintures, aquarelles, dessins et quelques gravures et une vingtaine de dessins de Fred Deux, certains de très grand format. Deux univers effrayant et fascinant, qui nous mettent à l’épreuve, nous questionnent, mais ramènent sans cesse à la vie.

Catherine Rigollet

Visuels : Fred Deux, Lenchristé, 1983, crayon sur papier, 195,5 x 104 cm. Zoran Music, Motif dalmate, 1955, huile sur toile de jute, 23 x 34 cm.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 9 septembre au 5 novembre 2022
Galerie Margaron
5, rue du Perche 75003
Du mardi au samedi, de 11h à 13h et de 14h à 19h
Entrée libre
https://galeriealainmargaron.com