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Vivre avec les animaux à Edo-Tokyo (XVIIe-XIXe siècle)

Plus de 100 œuvres (estampes, documents historiques, ustensiles quotidiens, éléments d’ornement et jouets…) évoquent ce lien oublié entre les hommes et les animaux de la capitale japonaise de l’époque Edo (XVIIe-XIXe siècle). Entre affection et fascination, mythes et croyances.

À Edo (qui deviendra Tokyo en 1868), des petits chiens jouent en liberté dans la rue. Une scène de vie quotidienne ordinaire. Si les chiens domestiques sont courants, comme ce chin, petit épagneul japonais couché sur un coussin près de sa maîtresse dans la maison d’un shogun (Général), les chiens errants sont légion dans les quartiers d’Edo, nourris par les habitants qui les considèrent comme faisant partie de la communauté. En pousse-pousse, les conducteurs prennent soin de les éviter, tout comme les poules présentes sur la route. Parmi les animaux de compagnie, on compte aussi des chats, des lapins, de petits oiseaux comme les rossignols et les cailles. Et plus surprenant, des insectes comme les grillons et les criquets et des poissons rouges, vendus dans les rues par des vendeurs ambulants. Paradoxalement, même les souris et les rats ont la côte ! Même s’ils causent des dégâts, amenant les ménages à élever des chats pour les chasser. Car trouver une souris chez soi au nouvel an augure une bonne année pour la maisonnée, puisqu’elle est considérée comme une messagère de Daikokuten, le dieu de la richesse.

Les innombrables estampes de l’ukiyo-e (« image du monde flottant ») ce mouvement artistique japonais de l’époque d’Edo (1603-1868) comprenant non seulement une peinture populaire et narrative originale, mais aussi et surtout les estampes gravées sur bois, constituent une mine d’informations sur le bestiaire japonais et le lien que les habitants entretenaient avec les animaux. Les domestiques, ceux utilisés pour le travail, tels les chevaux, les bœufs, les chiens, mais aussi les animaux sauvages, sangliers, cerfs, faucons, faisans... peuplant les grands espaces naturels d’Edo. Si certains sont chassés, d’autres jouissent d’une image particulière : ainsi le renard, connu pour être le messager d’Inari, dieu des moissons. Ou les grues symboles de longévité et de félicité.

Tandis qu’Edo s’urbanise et croît, sa population devient friande d’attractions comme l’exhibition des animaux rares : paons et perroquets amenés de Chine ou de Hollande, chameaux d’Arabie, tigres et panthères de Chine, éléphants indiens. Des slogans de l’époque affirmaient que voir l’un de ces éléphants apporterait la fortune et protégerait les spectateurs contre les maladies.
Les motifs animaliers ne sont pas seulement sur les estampes ou dans les livres illustrés, ils décorent les objets du quotidien, kimonos, peignes, blagues à tabac ou Inrô, ces petites boites portatives que les samouraïs et les marchands de la période Edo accrochaient à la ceinture de leur kimono. Les animaux sont aussi très présents dans l’univers du jouet, sciemment représentés très « mignons », une tendance commencée à l’époque Edo, poursuivit sous l’ère Meiji (1868-1912) et encore cultivée aujourd’hui avec la mode du « kawaii ».

Catherine Rigollet

Visuels : Coutumes et bonheurs de l’Est : les souris de la prospérité (détail). Yôshû Chikanobu 1890 (Meiji, 23).
Les premières notes de musique de l’année dans le gynécée du shogun (détail). Utaawa Kuniyoshi, vers 1852 (Kaei, 5).
Grand éléphant des Indes nouvellement arrivé au Japon par bateau, Ryôko, 1863 (Bunkyû, 3).

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 9 novembre au 21 janvier 2023
Maison de la culture du Japon
101 bis, quai Jacques Chirac 75015
Du mardi au samedi, 11h-19h
Nocturne le jeudi jusqu’à 21h
Tarifs 5€/3€
www.mcip.fr