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Aristide Maillol (1861-1944). Un amoureux des formes

Maillol a tellement sculpté de nus -féminins essentiellement- notamment Clotilde son épouse, puis Thérèse, sa bonne espagnole, longtemps véritable incarnation à ses yeux du canon idéal, puis Dina (Vierny), l’anti-modèle avec ses « bras impossibles » et des « formes qui fichent le camp, qui tournent toujours », qu’on a oublié le peintre et le décorateur qu’il fut d’abord ; venant tardivement à la sculpture.
C’est ce que rappelle cette grande exposition monographique de 230 œuvres qui réserve une large place au Maillol peintre et dessinateur, moins connu du public. Un peintre « passé de l’influence de Courbet à celle de Cézanne, manifeste dans ses paysages » (Maison en Roussillon, 1887), souligne Antoinette Le Normand-Romain, commissaire de l’exposition et co-auteur du passionnant et très documenté catalogue publié à cette occasion (Gallimard). Puis, après sa rencontre avec Gauguin (vers 1889), Maillol « privilégie la simplification formelle et comprend qu’il doit suivre une voie propre ».

En peinture, ses portraits sont tous de profil, comme ces fillettes dans les champs de La couronne de fleurs (1889), Tante Lucie (vers 1892) ou La femme à l’ombrelle (vers 1892) et le fond décoratif est privilégié à la ressemblance des sujets. Puis il s’intéresse à la tapisserie, se qualifiant de « brodeur », (créant même un atelier à Banyuls en 1895), attirant l’attention des Nabis avec lesquels il va entretenir de solides relations amicales et artistiques. Maillol sera toute sa vie un homme d’amitiés. Il s’essaie ensuite à la céramique, au bois sculpté (La Source, 1895-96, ou encore Danseuse, 1895) et aux premières baigneuses modelées, encouragé par le marchand Ambroise Vollard qui lui offre sa première exposition en 1902. Lancé, Maillol va s’attaquer désormais à des statues grandeur nature. Le collectionneur Ivan Morozov lui commande quatre figures de Saisons pour son salon de musique à Moscou, entre 1909 et 1912.

Il se plait toutefois à cultiver l’image d’un artisan autodidacte, un terrien tout droit issu de sa Catalogne natale, habillé en blouse bleue et portant un chapeau de paille d’ouvrier sur la tête, comme le décrit le comte Harry Kessler qui sera son principal mécène. Un amoureux des formes qui ne se lassera pas de les dessiner avant de s’en servir comme modèle pour ses sculptures, en pierre, coulées en bronze ou en plomb pour l’extérieur. La sculpture devient son principal moyen d’expression et lui l’un des chantres du nu féminin classique, hérité de l’antique. Un nu qu’il aime « plein et dense, en harmonie avec ce qu’il considère être le « type méditerranéen généreux et structuré. » Telle cette (Femme assise, dit aussi Méditerranée, 1905 ou encore cette femme couchée du Monument à Cézanne, dont la dernière version en bronze trône depuis 1929 dans le Jardin des Tuileries).
Toutefois, jamais il ne cessera de dessiner sur le vif ou de mémoire, revenant même à la peinture à la fin de sa vie. Durant la guerre, ses amitiés allemandes vont entacher durablement sa réputation (S’il refuse le voyage en Allemagne organisé pour les artistes français par l’occupant, il se rend cependant en 1942 à l’inauguration de l’exposition consacrée au sculpteur hitlérien Arno Breker, à Paris).

Oublié depuis 1961 et l’exposition monographique organisé au musée d’art moderne pour le centenaire de sa naissance, défendu grâce à l’action de Dina Vierny (son dernier modèle qui posera notamment pour La Montagne, La Rivière, puis pour son testament artistique, Harmonie), qui lui offrit un musée en 1995, abritant la plus grande collection d’œuvres de l’artiste au monde, Maillol se redécouvre en 2022 à Orsay.

Catherine Rigollet

 Catalogue sous la direction d’Antoinette Le Normand-Romain et Ophélie Ferlier-Bouat, 352 pages, 400 illustrations. 45€

Visuels : Aristide Maillol (1861-1944), Femme à l’ombrelle. Vers 1895. Huile sur toile, 190,5 x 149,6 cm. Paris, musée d’Orsay © RMN Grand-Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.
Danseuse, vers 1895, bois, H.22 ; L. 24,5 ; P. 5 cm. Paris, © RMN Grand-Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.
Profil de femme, vers 1896, 73,5 x 103 cm. Huile sur toile. Paris, musée d’Orsay © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Méditerranée, 1905 (modèle en plâtre) ; 1923-1927 (marbre). Marbre. H. 110,5 ; L. 117,5 ; P. 68,5 cm. Paris, musée d’Orsay. Photo © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Thierry Ollivier.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 12 avril au 21 août 2022
Musée d’Orsay
Tous les jours, sauf lundi, de 9h30 à 18h
Nocturne le jeudi jusqu’à 21h45
Tarifs : 16€/13€
Tél. 01 40 49 48 14
www.musee-orsay.fr


 Expo présentée ensuite à la Piscine à Roubaix du 18 février au 21 mai 2023