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Caillebotte. Impressionniste et moderne

Covid désoblige, elle fut longue et compliquée à monter cette exposition « Gustave Caillebotte, impressionniste et moderne » préparée par Daniel Marchesseau pour la Fondation Pierre Gianadda et qui devait se tenir l’été dernier. D’ailleurs, les huit tableaux conservés aux États-Unis qui devaient y figurer n’ont pas pu traverser l’Atlantique. Cela n’empêche pas cette rétrospective Caillebotte (1848-1894) de rassembler quatre-vingt-quatorze toiles issues des plus grands musées et collections particulières européens. L’exposition, accrochée principalement dans la galerie entourant la salle centrale de la Fondation, tourne autour de deux des tableaux les plus emblématiques de Caillebotte, Les Raboteurs de parquet (1875, musée d’Orsay) et Le Pont de l’Europe (1876, Petit Palais de Genève), exposés face à face de part et d’autre des vestiges du temple celte au milieu de cette salle centrale.

Les deux tableaux sont présentés dans leur contexte créatif, entourés d’études préparatoires ou partielles. Chronologique, cette exposition se déploie d’œuvres de formation (Une route à Naples de 1872) du jeune Gustave, qui fréquente alors les cours de Léon Bonnat, jusqu’à des tableaux de sa maturité, comme cette Allée bordée d’arbres de 1894.
Mais le commissaire Marchesseau nous propose aussi une lecture biographique, presque intime, de l’œuvre de Caillebotte. En effet, cette sélection de tableaux nous permet non seulement de suivre le peintre dans ses différentes demeures, l’hôtel particulier de la rue de Miromesnil (Paris), la propriété familiale d’Yerres (Essonne), devenue Propriété Caillebotte depuis 1995 (https://lagoradesarts.fr/-Maison-et-propriete-Caillebotte-.html), puis la propriété du Petit Gennevilliers (en face d’Argenteuil) que Gustave acquit avec son frère Martial en 1881 et où le peintre mourut le 21 février 1894, mais aussi à travers ses passions de collectionneur et mécène, de régatier et architecte naval, de jardinier (https://lagoradesarts.fr/-Gustave-Caillebotte-peintre-et-jardinier-.html). Une vie fort remplie pour quelqu’un qui ne vécut que 45 ans, si on ajoute à ses passions représentées sur les toiles exposées son hobby philatéliste et ses quelques années de conseiller municipal de Gennevilliers ; la ville où les Manet possédaient une maison depuis le XVIIIe siècle ! On sait les affinités du peintre avec son aîné Édouard Manet (1832-1883) et sa grande amitié avec son autre aîné Claude Monet (1840-1926). Les regards se croisent, les singularités se révèlent dans cette « peinture de la vie moderne » qu’ils inventèrent tous trois, contemporains des bouleversements technologiques, urbanistiques et sociétaux du dernier tiers du XIXe siècle.
S’ils ne les traitent pas de la même manière, ils abordent les mêmes thématiques qui semblent se répondre d’un tableau de l’un à un tableau de l’autre : perspectives des boulevards haussmanniens, loisirs d’intérieur dans le confort bourgeois (lecture, billard, piano…), bords d’eau et régates, gares, ponts et trains, usines… Cependant, Caillebotte donne à voir son époque sans se faire pour autant le chantre de ce progrès, de ce nouveau monde naissant, préférant même, les dernières années de sa vie, se réfugier dans sa maison du Petit Gennevilliers entre sa serre, son jardin, la Seine et les bateaux ! Des sujets d’ailleurs largement évoqués dans cette exposition à côté de portraits, autoportraits, de pièces de boucherie et de gibiers plus rarement montrés.
Une exposition qui vient confirmer la place essentielle qu’occupe désormais Caillebotte dans l’histoire du mouvement impressionniste, depuis l’exposition charnière de 1994 au Grand Palais pour le centenaire de sa mort. Pas seulement un mécène et collectionneur mais un artiste singulier à part entière. L’exposition clôt aussi un cycle consacré à l’impressionnisme à la Fondation Gianadda commencé en 1993 avec Degas.

Jean-Michel Masqué

Visuels : Les raboteurs de parquet, 1875. Huile sur toile, dim. 102cm x 146.5cm. Paris, musée d’Orsay, don des héritiers de Gustave Caillebotte par l’intermédiaire d’Auguste Renoir, son exécuteur testamentaire, 1894. Photo © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.
Le Pont de l’Europe, 1876. Huile sur toile, dim. 125cm x 180cm. Association des Amis du Petit Palais, Genève © Rheinisches Bildarchiv Köln, Michel Albers.
Boulevard des Italiens,1880. Huile sur toile, dim. 54cm x 65cm. Collection privée © Galerie Brame et Lorenceau, Paris.
Avenue de la Villa des Fleurs à Trouville, 1883. Huile sur toile, dim. 60cm x 73cm. Hasso Plattner Collection © Museum Barberini.
La Seine à Argenteuil, bateaux au mouillage, 1883. Huile sur toile, 60,2 cm x 73 cm. Collection privée, Europe. © D.R.

Archives expo en Europe

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 18 juin au 24 novembre 2021
Fondation Pierre Gianadda
59, rue du Forum - Martigny (CH)
Tous les jours de 9h à 19h
Plein tarif : 20 CHF, 18 €.
+41 (0) 27 722 39 78
www.gianadda.ch