Histoire et architecture de la villégiature en Ile-de-France
Au début du XIXe siècle, le dimanche, dès que l’été approche, on quitte les rues des faubourgs pour un peu d’air pur. Si depuis la Renaissance, on construit des édifices pour « aller aux champs », le phénomène prend de l’ampleur au XIXe siècle et s’élargit aux bourgeois, commerçants, artisans. Après la Seconde guerre mondiale, on parlera de résidences secondaires. On recherche les joies de la campagne, le plaisir des champs et des forêts. Celles de Poigny-la-Forêt, Rambouillet, Saint-Leu-la-Forêt ou Montmorency sont très prisées. Les bords de Seine, Oise et Marne sont aussi recherchés, tout comme la vue ! Sont à la mode : Louveciennes, Vernouillet, L’Isle-Adam et sa plage aménagée en 1910, Villeneuve-le-Roi… En parallèle se développent des villages d’artistes comme Barbizon et Auvers-sur-Oise.
BON AIR ET BELLE VUE
De taille très variable, la maison des champs n’est plus l’apanage des aristocrates ou riches bourgeois ; le chemin de fer favorisant aussi la démocratisation du phénomène. Château, maison de maître, villa, folie, bungalow, chalet ou simple cabanon, le vocabulaire de la maison de villégiature est aussi divers que les tailles et les styles. Concernant les fameux chalets, Flaubert, retournant à Trouville en 1853 regrette que : « Paris a envahi ce pauvre pays, plein maintenant de chalets dans le goût de ceux d’Enghien » (où ils prolifèrent à partir de 1830 après l’installation d’un établissement thermal.) « Si la maison de campagne est un marqueur social, son cadre souple permet d’y exprimer tout autant son désir de conformisme que de fantaisie », souligne Marianne Métais, co-auteur de l’ouvrage Châteaux, villas &folies, villégiature en Ile-de-France.
UN SUJET DE PRÉDILECTION POUR ARCHITECTE
Les architectes peuvent s’en donner à cœur joie, question style ou matériaux, entre le château à tourelles, le manoir à colombages, la blanche villa à l’italienne avec ses pilastres et son toit à faible pente, le cottage en bois, la maison en fer, briques ou meulières...Les publications fleurissent comme La vie à la campagne (1906) ou Le Cottage pour tous (1913), avec de nombreuses références. Qui dit maison de campagne, dit activités physiques (chasse, sports, canotage, baignade…) et style de vie moins formel qu’à Paris avec des tenues vestimentaire plus décontractées. Même le simple cabanon, en bois souvent, dont plusieurs sont répertoriés dans l’ouvrage, fait la joie de son propriétaire et est souvent associé au plaisir de cultiver son potager. À la retraite, certains citadins s’installeront à demeure dans leur petit pied-à-terre, le transformant en pavillon, en l’agrandissant ou en construisant une maison en dur à côté.
Potagers ou parcs, le grand plaisir de la « maison de villégiature », c’est le jardin. Les sociétés horticoles se développent et le modèle du jardin paysager va donner naissance à de remarquables créations ou l’eau tient une place centrale, tous comme les espèces rares. Les plus beaux parcs se couvrent de fabriques (pyramide, temple, glaciaire, tour en ruine ou pavillon chinois), comme la maison Caillebotte à Yerres dans l’Essonne ou le fameux Désert de Retz contigu à la forêt de Marly dont le terme de « désert » est à la mode depuis la parution en 1761 de La Nouvelle Eloïse de Jean-Jacques Rousseau décrivant le parc du marquis René-Louis de Girardin à Ermenonville et son désert constitué notamment d’un étang et d’une mer de sable.
Cet ouvrage, réalisé avec la Région Île-de-France, Service Patrimoines et Inventaire, décrit et illustre une cinquantaine de sites (choisis parmi un corpus de 1700, du XVIIIe au XXe siècle recensés) pour montrer la diversité des tailles, styles, catégories sociales concernés. De la Folie Desmares à Châtillon (Hauts-de-Seine) à la Maison Louis Carré à Bazoches-sur-Guyonne (Yvelines), une œuvre d’art totale, d’une luxueuse simplicité, construite par l’architecte finnois Alvar Aalto et ouverte à la visite. Car, privés ou achetés par l’État ou les Communes, devenus « Monument historique » pour certains, beaucoup de sites de villégiature hébergent désormais : musée, maison du patrimoine, centre d’hébergement pour enfants ou centre de séminaires…et sont ouverts au public ou à la visite. Des trésors de l’architecture de villégiature en Ile-de-France à découvrir.