Vous consultez une archive !

Jannis Kounellis

Depuis 2008, la Monnaie de Paris surfe sur la vague de la création contemporaine. Elle ouvre aujourd’hui ses salles aux vastes baies sur la Seine à l’une des figures majeures de l’Arte Povera (terme dû à l’historien d’art Germano Celant en 1967), Janis Kounellis. Celui-ci fêtera ses 80 ans pendant l’exposition.

Contrairement aux apparences, l’artiste, grec de naissance mais ayant vécu et étudié à Rome, se définit comme un peintre pour qui « l’histoire de la peinture est un perpétuel souvenir, une perpétuelle dépendance ». On ne voit ici que deux toiles au milieu des sculptures et installations, mais on est accueilli par huit grands chevalets sur lesquels reposent des “toiles” diptyques de fer. Au dos, il faut y découvrir un chiffre, année de naissance de peintres admirés par l’artiste : Masaccio, Géricault, Delacroix, Van Gogh et Picasso, entre autres. Mais après la révolution industrielle, est-il encore possible de peindre traditionnellement ?

Artisan plus qu’artiste, Kounellis utilise moins les matériaux pauvres que des matériaux organiques ou industriels (fer, charbon, verre, toile de jute) qu’il présente parfois sous leur forme brute. Les interprétations de ces œuvres sans titre ne sont pas aisées. Ces feuilles de fer, tailladées à la Fontana, roulées sur elles-mêmes, reposant sur des châlits et emmitouflées dans des couvertures militaires symbolisent-elles un hôpital de campagne ? Et ces couteaux, thème visuel récurrent : un, acoquiné avec deux poissons rouges dans une cuvette d’eau posée sur une chaise ? Ou par dizaines, pendus en vitrines ? Ce lampadaire de couteaux, lui, doit ramener à l’ampoule qui éclaire “Guernica”. Et ce feu qui traverse l’exposition, en vrai, en chandelle, ou suggéré par le charbon… ? Un clin d’œil à la fonderie de la Monnaie ?
Plus facile à interpréter, ces grandes “toiles” de fer où sont attachés des morceaux de charbon, réminiscence de ses débuts quand Kounellis truffait ses œuvres de chiffres et de lettres. Ainsi que la présence de l’artiste, in absentia, illustrée par un portemanteau où pendent son manteau et son chapeau, portés lors du montage de l’exposition.

On est décontenancé mais fasciné par ces tableaux sans toile, pinceau, huile ou chevalet, austères mais pas moroses, noirs mais lumineux. Et on apprécie, au cœur de l’exposition, une toile rose sur laquelle s’inscrivent quelques mesures de Stravinsky, qui seront jouées et dansées de temps à autre, devant un public de manteaux cousus ensemble. Une note de légèreté dans un univers esthétique pondéreux.

Elisabeth Hopkins

Visuels : J. Kounellis, Sans titre, 2016. Huit chevalets en fer sur lesquels sont posées des plaques en acier avec imprimées les dates de naissance d’artistes.
Sans titre (Carboniera), 1967, Charbonnière en métal avec charbon
Sans titre, 1969, Un lit de camp avec dalles en fer et combustibles. Un lit de camp avec une cage abritant six rats.
Sans titre, 2016. Base de clous
Photographe : Manolis Baboussis © Monnaie de Paris, 2016 Courtesy de l’artiste.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 11 mars au 30 avril 2016
Monnaie de Paris
11, Quai de Conti - 75006 Paris
Tous les jours de 11h à 19h
Nocturne le jeudi jusqu’à 22h
Plein tarif : 12€
www.monnaiedeparis.fr