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L’art mystique et sensoriel de Laurent Grasso

L’artiste contemporain Laurent Grasso (né en 1972) investit la grande nef du collège des Bernardins avec une série de nouvelles créations : peintures, vidéos, installations faisant écho au lieu, à sa force mystique et à sa beauté. Ce vaste projet conceptuel intégrant des éléments propres à ses films dans des peintures exécutées à la manière des Maîtres de la Renaissance reprend des phénomènes (nuages, feux, roches en lévitation) dans des architectures historiques.
Si l’ensemble de cette exposition résonne avec l’établissement et son architecture, le film Anima [2022], diffusé dans l’ancienne sacristie en est le point d’ancrage. Cette œuvre hypnotique nourrie de ses discussions avec l’historien de l’environnement Grégory Quenet a été tournée dans la forêt du Mont Sainte-Odile en Alsace dont elle s’inspire. L’artiste y livre une sorte de fable mêlant le réel et l’imaginaire d’un homme seul face à la nature.
Dans cet espace boisé, qui nous apparait dense et oppressant, flotte un étrange nuage bas, passe furtivement un renard, jaillissent des feux follets. Sur fond de sons d’une « inquiétante-étrangeté », le spectateur se sent entouré par l’invisible et en même temps porté par le souffle vital des arbres.

Le Mont St Odile se retrouve aussi symbolisé par la forêt de colonnes de la voûte cistercienne du Collège des Bernardins, sur lesquelles viennent se fixer une série d’huiles sur bois peintes à la manière des Maîtres de la Renaissance, toute du même format carré (84 x 84 cm). Les flammes symboles de destruction et de régénération, ainsi que le nuage ambiant du film Anima s’y retrouvent déportés sur les tableaux de la série Studies in the past pour laquelle l’artiste s’est inspiré des intérieurs historiques du XVIIe siècle hollandais, mais aussi des obiit, ces armoiries funéraires placées sur les piliers des églises. Une série complétée de sculptures poétiques qui associent là encore l’esthétique contemporaine et l’idéal classique.

« C’est une exposition infinie qui envahit la nef. La séparation entre intériorité et extériorité, qui fonde le naturalisme, disparaît, dans un dévoilement qui n’a plus rien à dévoiler. Il n’y a plus d’arrière-monde à explorer, plutôt une continuité qui oblige à penser de nouveaux modes de relations entre tous les êtres », écrit Grégory Quenet, commissaire de l’exposition, en introduction du beau livre illustré qui sert de catalogue (Ed. Gallimard, 35€).
Une expérience artistique et sensorielle qui nous interroge sur le caractère énigmatique de ce qui est.

Catherine Rigollet

Visuels : éléments de la série Studies in the past (huile sur bois, 84 x 84 cm) ; sculptures (synthetic marble, optic fiber, led, 25x20x20 cm et en fond Panoptes, 2022 bronze 90 x 105 x 15 cm) ; et images du film Anima, 18’ 14’’, 2022. © L’Agora des Arts.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Collège des Bernardins
20 rue de Poissy-75005 Paris
Du 14 octobre au 18 février 2023
Du lundi au samedi de 10h à 18h
Le dimanche de 14h à 18h
Fermée exceptionnellement le lundi 30 janvier
Entrée libre
https://www.collegedesbernardins.fr