Vous consultez une archive !

La Fabuloserie installe à la Halle saint Pierre son gigantesque cabinet de curiosités

La Halle Saint Pierre consacre l’année 2023 au merveilleux, au fabuleux et au fantastique avec une exposition consacrée à La Fabuloserie et à ses collections à l’occasion de ses 40 ans. Un fantastique bric-à-brac d’art brut et singulier.

Avant d’être une exceptionnelle collection d’art brut, La Fabuloserie est déjà l’aventure d’un homme : Alain Bourbonnais, à la fois peintre, dessinateur, graveur, metteur en scène, réalisateur de courts métrages et créateur d’une tribu truculente de personnages à la fois rabelaisiens et ubuesques, les Turbulents, sortes d’automates mécanisés confectionnés avec des matériaux du quotidien.
Alain Bourbonnais, qui a découvert l’œuvre de Jean Dubuffet à l’âge de 21 ans, lors de l’exposition dans le sous-sol de la Galerie Drouin en 1946, se met à collectionner des œuvres d’art brut puis ouvre une galerie, l’Atelier Jacob (45 rue Jacob) en 1972, pour exposer ses coups de cœur en commençant par Aloïse Corbaz, vite suivie de Lortet, Podestà, Brodskis, Stricanne, Barbisan, Deldevez. De la correspondance entre Jean Dubuffet et Alain Bourbonnais naît l’appellation « art hors-les-normes » qui devient le sigle de la galerie.

Mais la place vient vite à manquer et la galerie n’est guère rentable (l’art brut intrigue voire effraie encore à cette époque), Alain et sa femme Caroline aménagent alors une maison et un jardin à Dicy dans l’Yonne, et l’ouvrent à la visite en 1983. À la croisée de l’art brut, de l’art naïf et de l’art populaire, également ouvert sur les cultures extra occidentales, l’art hors-les-normes de La Fabuloserie n’a depuis cessé d’accueillir les œuvres singulières de créateurs dépourvus de soucis esthétiques, qui ne se disent ou ne se pensent pas professionnels de l’art, ne se préoccupent guère de donner des titres à leurs « œuvres », ni des dates. Un « temple du rêve, de l’imagination, de l’émotion » voulu par Alain Bourbonnais, entretenu pieusement aujourd’hui par ses filles Sophie et Agnès où tout est étrange, surprenant, insolite, parfois inquiétant, enchanteur aussi comme le fabuleux manège de Petit Pierre (https://lagoradesarts.fr/-La-Fabuloserie-Caverne-magique-de-...).

Cette exposition fait revivre cette fabuleuse aventure, en présentant une sélection d’œuvres d’une cinquantaine d’artistes, ainsi qu’un ensemble photographique sous forme de diaporama rendant vivant le parc de La Fabuloserie de Dicy.
Parmi eux, Albert Geisel (1905-1970), ancien mineur des Ardennes sculptant de drôles de gueules dans des billes de pin sylvestre. Francis Marshall (1946-), instituteur dans la Normandie rurale des années 1960 et ses inquiétantes poupées de chiffons ligotées, symbolisant l’impossibilité d’une certaine population à sortir de sa condition de misère. Émile Ratier (1894-1984), cultivateur devenu aveugle après la Grande Guerre, luttant contre sa dépression en fabricant des mini-machines agricoles, manèges et autres sculptures en bois à manivelles et mécanismes sonores. Giovanni Podestà (1895-1976) et sa production extravagante de sculptures subversives et drôles dénonçant les injustices sociales. Michel Nedjar (1947-) tailleur du Sentier et ses poupées de chiffon aux pouvoirs magiques à l’image de celles trouvées au cours de ses voyages aux quatre coins du monde.
On pourrait citer encore Paul Amar et ses compositions féeriques en milliers de coquillages. Cet anonyme surnommé Pierrot Le Fou et ses dizaines de pages de cahier sur lequel il dessinait son Paris, avec ses monuments et ses animaux du zoo. Ou encore Marcel Landreau, chef de train glanant pierres et cailloux sur les voies de chemin de fer pour construire des scénettes dans son jardin de Mantes-la-Jolie.
Sans oublier bien sûr la célèbre Aloïse, icône de la première exposition de l’Atelier Jacob en septembre 1972, artiste exaltée jusqu’à être internée, développant un univers fantasmé peuplé de personnages princiers et d’héroïnes historiques dessinés à la mine de plomb et à l’encre…

Autant d’univers uniques et authentiques, expressions du rêve, de la folie, ou de la souffrance.

Catherine Rigollet

Visuels : Œuvres de : Albert Geisel (sculptures en bois). Émile Ratier (machines en bois). Anonyme, dit Pierrot le Fou (dessin). Giovanni Podestà (« sans titre », bois). Affiche Aloïse, expo Atelier Jacob, 28 septembre 1972. © L’Agora des Arts.

Archives expo à Paris

Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 25 janvier au 25 août 2023
La Halle Saint Pierre
2, rue Ronsard- 75018
Du lundi au vendredi 11h-18h
Samedi : 11h-19h
Dimanche : 12h-18h
Tarif : 9€/7€
https://www.hallesaintpierre.org