Sur un grand tableau, Vénus est épiée par deux satyres. Tandis que l’un soulève le drapé de la déesse pour jouir de sa nudité, l’autre paraît se masturber derrière un tronc d’arbre en observant la scène…Cette compositions peinte vers 1626, est l’une des plus provocantes de Nicolas Poussin (1594-1665). Considéré comme le maître de l’école classique française, l’archétype du peintre-philosophe, l’artiste s’est également adonné au pur plaisir de peindre, en déployant une iconographie des plus licencieuses. Certains de ses tableaux ont même été jugés si érotiques qu’ils ont été mutilés, découpés, voire détruits, dès le XVIIe siècle.
Autour du thème de l’Amour, l’exposition du musée des beaux-arts de Lyon fait découvrir un Poussin méconnu, séducteur et séduisant, qui s’est fait remarquer par l’hédonisme de ses premiers tableaux romains, où la domination de l’Amour sur les hommes comme sur les dieux est mise en scène à travers les mythes de l’antiquité gréco-romaine (nombreuses scènes de bacchanale). L’Amour a constitué un sujet et une inspiration constante pour l’artiste, jusqu’aux derniers chefs-d’œuvre, même quand l’ombre de la mort plane sur les plaisirs de l’amour, comme dans l’un de ses tableaux inspirés des Métamorphoses d’Ovide quand la belle Thisbé va bientôt se donner la mort, incapable de survivre à Pyrame, dont elle est passionnément éprise (Tempête avec Pyrame et Thisbé, 1651).
Bien loin de l’image austère du peintre-philosophe, qui s’est imposée pour le grand public, voilà un Poussin sensuel, voire érotique, mais aussi peintre-poète proposant une méditation profonde sur la puissance universelle et tragique de l’amour.
Visuel : Nicolas Poussin, Vénus épiée par deux satyres, vers 1626. Huile sur toile, 100,5 x 122,8 cm. Zurich, Kunsthaus. Image © Kunsthaus Zürich.