Du jardin aux salles d’exposition de l’artothèque de Saint-Denis de La Réunion, ancienne maison de maître des années 1840 (brièvement siège du consulat d’Angleterre dans les années 1930), les enfants sont partout en ce matin d’école. Encadrés par leurs professeurs et les médiateurs de l’endroit, ils découvrent des œuvres « en vrai » ou s’initient à l’art contemporain. « Un des objectifs de l’artothèque, assure son responsable Max Gence, est de sensibiliser le jeune public à la création contemporaine, de faire en sorte que ce public s’approprie des clés de lecture, des éléments de code pour apprécier l’art contemporain. Pour cela, nous misons sur la médiation, l’organisation d’ateliers et de conférences. »
Des prêts d’œuvres d’art
Si l’artothèque, créée en 1991 sur l’initiative du Département de La Réunion, est un lieu d’exposition et de résidences d’artistes contemporains, elle est principalement vouée au prêt d’œuvres d’art à choisir dans sa collection de 2000 pièces des XXe et XXIe siècles, issues majoritairement d’artistes réunionnais, vivant ou ayant vécu à La Réunion, mais aussi d’artistes africains, asiatiques et européens, signalant par là le dynamisme artistique d’une île-creuset. C’est le cas de Robert Labor (né en 1937) qui relie ses formes et ses couleurs de manière viscérale à sa culture créole. De Catherine Boyer (née en 1971) qui utilise les techniques de dessin et de volume, le modelage de la terre, la combinaison de la vidéo, de la photo et des nouveaux matériaux pour créer un univers tenant à la fois du végétal et de l’animal, aux allures de réminiscences sous-marines. De Jean Legros (1920-2004) qui laisse derrière lui un patrimoine exceptionnel de plus de trois milles clichés de La Réunion, de l’après-guerre à 1970. Ou encore d’Esther Hoareau, Eric Grondin, René Frances, de Vivien Racault, Gabrielle Manglou, Christophe Dennemont, Stéphane Kenkle, Charles Delcourt et David Lemort, etc.
Pour une adhésion annuelle variant de 15 euros (étudiants, sans emploi) à 150 euros (collectivités, entreprises), il est possible d’emprunter de 12 à 40 œuvres par an. Riche d’une bibliothèque fournie, ouverte aux chercheurs, étudiants et simples amateurs, elle prête aussi des documents d’art (livres, catalogues, revues, dvd…). Aujourd’hui, elle compte 120 abonnés et 800 œuvres sorties de sa collection.
Panorama
L’artothèque fête en 2021 ses trente ans d’existence, ce qui donnera lieu à différents événements et célébrations en fin d’année, à la création d’un nouveau site Internet et au réaménagement du jardin en jardin d’œuvres d’art. En réaction à la crise pandémique, et parce que l’art est essentiel, mais aussi dans un désir de réaffirmer son rôle de soutien et d’accompagnement de la création contemporaine locale, l’artothèque a proposé d’octobre 2020 à l’été 2021 une exposition collective en deux volets, Panorama 1/2 et Panorama 2/2, présentant le travail de 47 artistes de différentes générations mais dont le trait commun, pour la plupart d’entre eux, était d’être diplômés de l’École supérieure d’art de La Réunion qui commémore aussi ses trente ans en 2021. « Panorama, c’est une diversité de pratiques et d’engagement, tous ces signes avec lesquels nous traçons une vision collective et critique du monde qui s’annonce », a écrit Antoine du Vignaux, commissaire de l’exposition.
Jean-Michel Masqué, reportage juin 2021
– À voir aussi à la Réunion : Les collections beaux-arts du musée Léon-Dierx.
Visuels : Vue de L’Arthotèque, photo D.R
René Frances (Né en 1941, vit et travaille à La Réunion), Vaudou, 1987, lithographie, 25/25, 60x51cm.
Robert Labor (né en 1937 à La Réunion), Petite maison à la Pointe (quartier du Tampon), année 1980. Huile sur toile, 86 x 85 cm.
Esther Hoareau (née en 1976 à La Réunion), Something happened in my bathroom I, 1999. Tirage numérique, 130 x 120 cm.
Collection de l’Arthotèque. Courtesy L’Arthotèque.
