Musée Léon-Dierx à la Réunion : vocation beaux arts

Il ne saurait être question de limiter le musée Léon-Dierx à sa donation Vollard ! C’est en tout cas ce à quoi le directeur du musée Bernard Leveneur se refuse, même si le rôle d’Ambroise Vollard (1866-1939), né à Saint-Denis de La Réunion, dans l’histoire de l’art moderne demeure majeur. Pour rappel, en 1947, Lucien Vollard, cadet du fameux marchand d’art et collectionneur, cède 157 œuvres de la collection de son frère au musée de Saint-Denis, dont plus de la moitié sont des estampes. Le choix des œuvres est alors fait par Ary et Marius Leblond, les créateurs du musée Léon Dierx en 1912, enrichissant ainsi la collection initiale et confirmant la vocation « Beaux-Arts » du musée Léon-Dierx, le premier d’outremer par l’antériorité, l’importance et la richesse des collections.

Marius-Ary Leblond est le pseudonyme de deux journalistes-écrivains réunionnais (prix Goncourt 1909), amis d’enfance ou cousins selon les sources, Georges Athénas (1880-1953) et Aimé Merlot (1877-1958). Ils ont baptisé le musée en hommage à Léon Dierx (1838-1912), poète et peintre réunionnais, sans doute le plus connu des créoles dans les milieux artistiques français au tournant du XXe siècle. La collection permanente du musée repose sur deux piliers consolidés depuis 1912 par les donations et acquisitions au fil des décennies : des œuvres évoquant La Réunion et l’océan Indien, notamment des paysages et portraits, et des œuvres des principaux mouvements artistiques européens fin XIXe-début XXe siècle. Ce qui fit du musée Léon-Dierx un des premiers musées d’art contemporain lors de son ouverture !

C’est ce parcours de l’océan Indien aux paysages métropolitains ruraux et urbains que nous propose aujourd’hui le nouvel accrochage de la collection permanente, complètement repensé au niveau des lumières comme des peintures pour sa réouverture mi-mai 2021. Le grand paysagiste réunionnais Adolphe Leroy (1832-1892) voisine avec le Mauricien méconnu Numa Desjardins (1826- ?) dont le musée possède deux des quatre paysages aujourd’hui connus. Une des originalités de cette partie « océanique » est d’avoir consacré dès l’ouverture du musée une section thématique à Paul et Virginie (1788), roman à succès international de Bernardin de Saint-Pierre qui se déroule sur l’île Maurice et suscita une importante production iconographique, une section qui ne cesse de s’épanouir, comme le montre les récentes acquisitions de quatre sculptures de Charles Cumberworth (1811-1852) sur ce thème. On remarque aussi l’important fonds d’œuvres (peintures et dessins) de la portraitiste et peintre de genre Adèle Ferrand (1817-1848). Dans la partie européenne, où se glissent des paysages de Léon Dierx, les artistes français (Bernard, Caillebotte, Denis, Guillaumin, Maillol, Roussel, Valloton, Valtat…) côtoient des artistes étrangers attirés par les mouvements avant-gardistes parisiens des XIXe et XXe siècles, l’Espagnol Iturrino, le Belge van Rysselberghe, le Norvégien Diriks, l’Américain Frieseke ou l’Australien Bunny.

Depuis les années 1990, le musée mène une ambitieuse politique d’expositions temporaires d’artistes d’envergure internationale dont l’œuvre est en lien avec l’histoire, l’identité, un passé multiculturel : Chen Zhen, Yan Pei Ming, Sarkis, Erro... À l’issue des expositions de ces artistes, certaines de leurs œuvres rejoignent le fonds. L’important fonds d’estampes continue lui-aussi de s’enrichir tandis que des œuvres réunionnaises majeures sont en cours de restauration.
Un musée bien vivant au parcours tout à fait original qui invite à un voyage sous les tropiques dans une île dont les trésors sont donc aussi artistiques.

Jean-Michel Masqué, reportage juin 2021

 À voir aussi à Saint-Denis de la Réunion : les expositions de l’Artothèque.

Visuels : Vue du musée Léon-Dierx. © D.R
Louis Valtat (1869-1952), Portrait d’Ambroise Vollard, vers 1908. Huile sur toile, 81,5 x 65,5 cm.
Félix Vallotton (1865-1925), Femme lisant dans un intérieur, 1910. Huile sur toile 100 x 81 cm.
Numa Desjardins (1826- ?), Vue de Saint-Denis, 1854. Huile sur toile, 72 x 106 cm.
Adèle Ferrand, Autoportrait à la robe blanche, 2e quart 19e siècle.

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Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Toute l’année
28, rue de Paris (Saint-Denis de La Réunion)
Du mardi au dimanche
Plein tarif : 2 €
0262 20 24 82
https://www.musee-leondierx.re/fr/