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André Claudot (1892-1982). La couleur et le siècle

Si le peintre bourguignon André Claudot (1892-1982) est indissociable de l’histoire de sa région qui fut sa première source d’inspiration, son parcours se confond avec l’histoire et les combats du XXe siècle et ses œuvres influencées par le fauvisme, l’expressionnisme et la caricature méritaient d’être plus largement connues. Saluons l’initiative du musée des beaux-arts de Dijon (ville natale du peintre) de lever le voile sur cet artiste injustement oublié.

Anarchiste avant 1914, caricaturiste pacifiste et antimilitariste après la guerre, socialiste vingt ans plus tard, antifasciste et résistant, puis communiste, Claudot participe très tôt aux groupes d’artistes engagés de l’école de Paris. Refusant la tradition académique, habité d’une fougue créatrice, la couleur et le militantisme vont diriger sa peinture tout au long de sa vie. Si ses caricatures croquées avec vivacité en trois coups de crayon frappent par leur franchise du geste et un engagement militant qui ne faiblira pas, ses paysages et ses scènes de genre captent le regard par leur réalisme, la puissance du trait, le fauvisme des tons.

Passées les premières toiles bourguignonnes de jeunesse au style encore académique, sa palette se libère lorsqu’il arrive à Paris en 1909 pour poursuivre sa formation à l’École des Arts décoratifs…où il ne restera que trois mois. Il a tout juste 17 ans, dessine la nuit aux Halles et commence à publier dans les journaux anarchistes. Son trait s’arrondit, les formes se cernent de noir et se remplissent de couleurs fauves (Caveau des innocents aux Halles, 1910). Pendant la Grande Guerre, au front à Verdun et au Chemin des Dames, puis à son retour, il traduit à l’encre de Chine et à l’aquarelle les horreurs des combats (Squelette au combat, vers 1920-1921).

En 1920, installé à la Ruche avec sa femme Suzanne, André Claudot fréquente les artistes russes de l’École de Paris, tels Kikoïne et Krémègne et livre ses caricatures au journal Libertaire, lancé en France par Louise Michel et Sébastien Faure en 1895, tout en exposant ses toiles dans des vitrines de magasin et dans des salons. En 1926, à l’initiative du peintre Lin Fengmian (l’un des premiers artistes chinois à étudier en France de 1918 à 1925, à Dijon d’abord et à Paris ensuite), il s’embarque pour la Chine, nommé professeur de dessin et peinture à l’École nationale des Beaux-Arts de Pékin, puis de celle d’Hangzhou. Il peint la misère de Pékin comme les beautés du Lac de l’Ouest. À son retour en 1930, il rapporte près de 800 œuvres, croquis, encres et peintures réalisés sur le vif le plus souvent (Carrefour à Pékin, 1932 ; Sur la route de Fouyang, un matin, 1929). Un corpus qui frappe par sa palette éclatante et son naturalisme. Claudot a peint la Chine telle qu’il la voyait, sans romantisme, ni exotisme. Il va peindre avec la même exigence des sujets parisiens (Cabanes sur la Zone, 1924 ; Usine électrique à Argenteuil, 1932), puis bourguignons (Clocher de Couchey, vers 1935-1938 ; Paysage de Remilly-en-Montagne, 1963).

Toujours avec la même palette, le même militantisme (il est devenu socialiste au moment du Front populaire, puis communiste à partir de 1940 et engagé dans la Résistance) et sa causticité tranchante, il continuera de dénoncer, tout au long de sa vie, les violences de l’histoire, des exactions des guerres en Espagne et en Indochine aux crimes racistes du Ku Klux Klan (La Divine surprise et autres joyeusetés, 1945-1946 ; Ku Klux Klan, 1971). Publié à l’occasion de l’exposition, le catalogue retrace le parcours de l’exposition, intègre un passionnant abécédaire et rassemble un ensemble important d’œuvres d’André Claudot issues de collections publiques et privées, constituant un véritable essai scientifique consacré à l’artiste.

Catherine Rigollet

 La réouverture du musée des Beaux-Arts en mai 2019, après plus d’une décennie de travaux et une métamorphose complète, fait la part belle aux collections et la mise en valeur du parcours permanent, qui couvre plus de deux millénaires d’histoire de l’art à travers plus de 1500 œuvres, dont la plupart ont bénéficié d’une restauration à l’occasion de la métamorphose récente du musée. La salle des festins du palais de Philippe le Bon qui abrite désormais les Tombeaux des Ducs est emblématique des collections médiévales (https://lagoradesarts.fr/-Sur-les-traces-des-Ducs-de-Bourgogne-a-Dijon-.html) Le XXe siècle est fortement associé à l’importante donation effectuée par Pierre et Kathleen Granville en 1974, 1976 et 1986. À côté de la donation Granville, des artistes régionaux et des peintres figuratifs prolongent la tradition du XIXe siècle.

Visuels : André Claudot, Caveau des innocents aux Halles, 1910. Aquarelle sur papier. Collection particulière.
André Claudot, Squelette au combat, vers 1920-21. Aquarelle sur papier. Collection PJL.
André Claudot, Sur la route de Fouyang, un matin, 1929. Huile sur toile. Collection particulière.
André Claudot, Clocher de Couchey (Symphonie automnale), huile sur toile, 1935-38. Musée des beaux-arts de Dijon, achat 1949.
André Claudot, Ku Klux Klan, 1971, Huile sur toile. Collection particulière

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Visuels de l'artiste
Infos pratiques

Du 26 juin au 20 septembre 2021
Musée des beaux-arts de Dijon
Palais des ducs et des États de Bourgogne
Place de la Sainte-Chapelle
Tous les jours, sauf le mardi, de 10h à 18h30
Fermée le 14 juillet
Entrée libre
https://beaux-arts.dijon.fr/


 Catalogue de l’exposition, Ed. In Fine, 35€