Ces dernières années, plusieurs musées parisiens ont mis en lumière l’art moderne des pays scandinaves, qui nous est parfois mal connu, avec de grandes expositions consacrées à des artistes tels les Norvégiens Edvard Munch et Harriet Backer, les Danois Hammershøi et Christian Krohg, les Suédois Carl Larsson, Andres Zorn, Hilma af Klint et Bruno Liljefors, les Finlandais Hélène Schjerfbeck, Albert Edelfelt et actuellement Pekka Halonen (exposition du 4 novembre 2025 au 22 février 2026 au Petit Palais / lire notre article.).
On les retrouve réunis avec de nombreux autres artistes dans cette histoire complète de l’art moderne de chacun des cinq pays scandinaves (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède) racontée par Serge Fauchereau et abondamment illustrée. Embrassant la période allant des années 1870 aux années 1950, l’ouvrage s’étend donc de l’avènement de l’impressionnisme côtoyant encore pleinairisme, jusqu’aux avant-gardes des années 45-50 ouvrant l’art contemporain. L’Islande constitue une révélation, tant son histoire de l’art moderne et ses artistes nous sont peu connus, mis à part Guðmundur Guðmundsson, dit Erró (né en 1932), l’une des figures de proue de la Figuration Narrative. On découvre ainsi le sculpteur Einar Jónsson dont l’œuvre s’inspire de la mythologie nordique, ou le prolifique Johannes S. Kjarval et ses paysages fluctuants entre symbolisme et surréalisme qui ont marqué son compatriote contemporain Olafur Eliasson « reconnaissant une dette envers son aîné ».
Fauchereau met en exergue ce mélange de tradition et d’originalité qui fait la spécificité de cet art moderne scandinave, soulignant que malgré la proximité géographique de ces cinq pays, « on ne peut rapprocher leurs traits culturels qu’avec prudence ». Chacun a sa chronologie particulière, comme ses propres relations avec ses voisins et l’art mondial. Il en va de même pour les artistes, qui lorsqu’ils voyagent, s’imbibent d’influences diverses, effectuent des allers-retours de styles. Ainsi le Suédois Erik Olson tour à tour abstrait, surréaliste ou religieux, tandis que le Finlandais Gallen-Kallela, parti d’un réalisme pleinairiste, recherche un style national spécifique.
Pays après pays (présenté par ordre alphabétique), Serge Fauchereau revient sur la carrière de nombreux artistes, célèbres ou plus méconnus et souligne l’importance des artistes femmes dans ces pays où les droits des femmes ont très tôt été défendus. Il consacre un chapitre entier à plusieurs d’entre elles, telles la danoise Franciska Clausen(1899-1986) convertit à l’abstraction géométrique, la finlandaise Hélène Schjerfbeck et ses saisissants autoportraits, la Norvégienne Harriet Backer qui puise aussi bien son inspiration dans le courant réaliste que dans les innovations de l’impressionnisme, ou encore la Suédoise Hilma af Klint et son abstraction ésotérique. On appréciera que Serge Fauchereau laisse souvent la parole aux artistes, « convaincu qu’une citation intéressante vaut la plus longue explication ».



